Thèmes A B Ca-Ch Ci-Cy D E F G H IJK La-Li Lo-Ly Ma-Mi Mo-My

N O PA-PI PL-PY Q R S T U V-Z

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

   
Agios
  T. n.m. Terme populaire, sous lequel on comprend tous les menus affiquets & parures affectées des femmes du commun. On dit à Paris en se moquant des colifichets d'une femme : Ce sont agios de mariée de village.
   
Agiot
  T. n.m. Trafic d'argent ou de billets, qui se fait sur la place. Faire l'agiot. Cet homme s'est bien enrichi à l'agiot. Agiot se dit aussi du temps que ce commerce a duré. Pendant l'agiot on a vû naître des fortunes extraordinaires.
   
Antan
  T. n.m. L'année précédente. Il est tout à fait bas et populaire.
   
Ballon
  T. n.m. Grosse boule de cuir ronde & creuse, qui couvre une vessie, qu'on remplit de vent par une languette, ou soupape, lequel air faisant ressort, rend le ballon propre à se réfléchir. Il n'y a guère que les écoliers qui jouent des parties de ballon.
   
Biberon
  T. n.m. Ivrogne ; qui boit avec excès. Les Allemands sont de grands biberons. Ce mot est bas & populaire.
Biberon, est aussi un vase qui a un tuyau extérieur qui sert à verser la liqueur qui y est contenue, & par où on peut boire avec aspiration.Les vinaigriers & les vaisseaux où on met l'huile ont un biberon.
   
Biscuit
  T. n.m. Pain fort desséché par une double cuisson, d'où il est appellé biscuit, pour le garder long-temps, & particulièrement sur la mer. Le biscuit est bon à tremper dans le vin d'Espagne. La soute est le lieu où on garde le biscuit dans les vaisseaux. Le biscuit pour les voyages de long cours se cuit quatre fois, & on le fait six mois avant l'embarquement. Le biscuit qu'on charge sur les vaisseaux du Roi, est de farine de froment épurée de son, & de pâte bien levée.
     
Boulevart
 
T. n.m. ou boulevard. Gros bastion. On ne se sert plus de ce mot en termes de guerre. On dit encore à Paris, Aller sur le boulevart de la porte S. Antoine, qui est un des plus gros bastions de France.
Nicot dérive ce mot de boule, & waer Flamand, ou du Picard ward, qui signifie garder, comme qui diroit, défense contre les boulets. Mais Ménage croit qu'il vient de l'Allemand bolwerk, qui signifie ouvrage de poutre ; bol signifiant poutre, & werk, ouvrage : .
Boulevart, se dit par extension des places fortes qui couvrent tout un pays, & qui en défendent l'entrée aux ennemis. Rhodes étoit autrefois le boulevart de la Chrétienté. Il se dit aussi figurément de tout ce qui sert de défense, & qui fait obstacle à l'ennemi. Le Tygre & l'Euphrate sont les deux puissans boulevarts de ce Royaume.
   
Cafard
  T. n.m. Bigot, hypocrite. Il se dit particulièrement des gens qui font leurs affaires sous prétexte de Religion, en abusant de la simplicité & de la confiance des autres.
Ménage dérive ce mot de l'Arabe cafar, qui se dit par les Arabes proprement d'un homme qui de Chrétien s'est fait Turc, ou de Turc Chrétien. Cafara signifie en leur langue nier.
   
Calligraphe
  T. n.m. Ecrivain, Copiste, qui mettoit autrefois au net ce qui avoit été écrit en notes par les Notaires. Ce qui revient à peu près à ce que nous exprimerions maintenant ainsi, Celui qui fait la grosse d'une minute. Autrefois on écrivoit la minute d'un Acte, le brouillon ou le premier exemplaire d'un ouvrage en notes ; c'est-à-dire, en abréviations, qui étoient une espèce de chifre ; Cela se faisoit pour écrire plus vîte & pouvoir suivre celui qui dictoit. Ceux qui écrivoient ainsi en notes s'appelloient en Latin Notaires, & en Grec Ecrivains en notes, & gens qui écrivent vîte. Mais parce que peu de gens connoissoient ces notes, ou ces abréviations, que d'ailleurs ces premiers exemplaires ne pouvoient être assez nets ni assez propres ; d'autres Ecrivains, qui avoient la main bonne, & qui écrivoient bien & proprement, les copioient pour ceux qui en avoient besoin, ou pour les vendre ; & ceux-ci s'appelloient Calligraphes.
   
Carrousel
  T. n.m. Course de chariots & de chevaux : fête magnifique que font des Princes ou des grands Seigneurs pour quelque réjouissance publique, comme aux mariages, aux entrées des Rois.
   
Cartouche
  T. n.m. C'est le nom d'un fameux voleur qui fut exécuté en 1721. De-là est venu que pour dire qu'un homme est un scélérat, on dit par un proverbe populaire que c'est un vrai Cartouche.
   
Catherinette
  T. n.f. On donne ce nom dans quelques collèges de Paris à des thèses que l'on fait soutenir vers la fête de Sainte Catherine, patrone des écoliers & surtout des philosophes.
   
Cercueil
  T. n.m. Vaisseau de plomb propre pour transporter & enterrer les morts. Quand il est de bois, on l'appelle bière.
   
Châtaigne
  T. n.f. On a repris dans le Dictionnaire qu'on ait dit qu'en quelques endroits on en fait de la bouillie. Cette prétendue bouillie, dit-on, n'est autre chose que des châtaignes auxquelles on a ôté leurs peaux, & qu'on fait cuire dans l'eau sans cependant les rompre. Il est faux pareillement, ajoûte-t-on, qu'on en fasse du pain : la farine de châtaigne ne pourroit pas se lier. Ce qui a donné occasion à cette erreur, c'est que dans quelques pays, comme en Limousin, les paysans vivent presque toute l'année de châtaignes, ou cuites ou séches, sans manger de pain, de sorte que les châtaignes leur en tiennent lieu. Il faudroit avoir parcouru toute la France, pour voir ce qui est le plus vrai sur cela.
   
Chenevis
  T. n.m. Petite graine qui est la semence de la plante dont on tire le chanvre. C'est un grain dont les oiseaux sont friands & qui sert à nourrir ceux qui sont en cage. Le chevenis étoit mis autrefois au nombre des légumes que l'on servoit frites au dessert. Mais à présent, ce mauvais ragoût est entièrement banni des tables. Il est mauvais à l'estomac & à la tête. Il aliéneroit l'esprit à qui en mangeroit beaucoup. L'on en fait de l'huile qui sert aux lampes & à quelques pauvres gens qui en mangent au potage.
(En latin, cannabis semen, qui n'est autre que notre cannabis actuel).
   
Clientèle
 

T. n.m. Protection que les grands Seigneurs de Rome donnoient aux pauvres citoyens. Le crédit des Romains dépendoit d'avoir une grande & nombreuse clientèle.
Les Avocats & les Procureurs se servent de ce mot, en parlant des parties dont ils sont chargés de défendre les intérêts. C'est un tel Avocat ou un tel Procureur qui a la clientèle de cette personne, pour dire, qui défend ses intérêts. On dit qu'un Avocat à de belles clientèles, pour dire, qu'il a de belles affaires, ou qu'il est chargé des intérêts de personnes distinguées.

   
Colle forte
  T. n.f. est celle qui se fait avec des pieds, des peaux, des nerfs, des cartilages de boeuf, qu'on fait macérer quelque temps, puis bouillir fort long-temps jusqu'à ce que le tout devienne liquide. On la passe à travers d'un gros linge, & on la jette sur une pierre platte où elle se congèle ; & on la coupe par morceaux. On l'appelle en quelques lieux colle de cerf ; & Mathiole dit qu'il s'en fait de cuir de toutes sortes de bêtes à quatre pieds. La meilleure est celle qui vient du taureau, qui est blanche & claire, & qui se fait à l'Isle de Rhodes. Elle sert aux Menuisiers pour coller & joindre leur bois, ou les ornemens de gros carton. Il est défendu par plusieurs statuts d'Artisans, d'employer de la colle forte faite avec des rognures ou parures de cuir. Il y a aussi de la colle à miel, dont se servent les Doreurs, qu'ils appellent bature. On dit aussi d'un homme enrhumé qui crache beaucoup, qu'il crache de la colle.
   
Compost
  T. n.m. Terme d'Almanach. La science de compter le temps par le mouvement des astres, par rapport à l'Eglise, s'appelle Compost Ecclésiastique. Il a été établi principalement pour la célébration exacte de la Pâque, qui règle toutes les autres Fêtes mobiles. Il est composé du Cycle Solaire, du nombre d'or, ou de l'Epacte, de la Lettre Dominicale, & de l'Indiction Romaine. En Chronologie on l'appelle le Comput Ecclésiastique.
On appelle aussi en termes de Marine, ou d'Hydrographie, compost, l'Art de trouver les jours de la Lune, & ensuite les marées, pour l'usage de la navigation. Le compost est sur tout nécessaire pour le cabotage, c'est-à-dire, pour naviger en suivant toujours les côtes. Les Pilotes côtoyers doivent savoir le compost. Les Professeurs Royaux d'Hydrographie doivent apprendre le compost aux jeunes gens qui se destinent à la mer. Il y a des livres pour les Pilotes sous le titre de compost manuel. On y met la situation des Ports pour la connoissance des marées, &c.
Compost, autrefois avoit une signification plus étendue, & signifioit en général une composition, un recueil. C'est de là qu'est venu l'usage d'aujourd'hui, qui donne à ce mot la signification particulière expliquée ci-dessus.
Compost, est aussi un terme d'Agriculture, qui signifie le bon état d'une terre
   
Compote
  T. n.m. Assaisonnement de viandes qu'on fait cuire dans un pot avec du lard & des épices. Une compote de pigeonneaux. On le dit aussi de la cuisson des fruits ou confitures qu'on veut manger promptement.
   
Confisquer
  T. v. Adjuger au fisc, ou à ceux qui en ont les droits. On confisque le corps & les biens des criminels & des rebelles.
   
Consommateur
  T. n.m. Terme théologique. Il ne se dit qu'en certaines phrases consacrées. Jésus-Christ est l'auteur et le consommateur de notre foi. C'est-à-dire, il a achevé, il a accompli le mystère de notre foi, confirmé nos espérances.
   
Corbillard
  T. n.m. Coche d'eau qui mène à Corbeil, petite ville à sept lieues de Paris. On appelle ironiquement un corbillard, un carosse bourgeois, où on voit plusieurs personnes fort pressées.
   
Corsage
  T. n.m. Terme populaire qui signifie la taille. Cette paysanne est d'un beau corsage.
   
Cotignac
  T. n.m. Confiture, ou pâte faite de jus de coins de sucre royal, & de vin blanc le meilleur qu'on trouve. Le bon cotignac se fait à Orléans. Le cotignac est astringent ; si on le prend à l'entrée du repas il fortifie l'estomac, aide à la digestion, garantit la tête des fumées qui montent au cerveau après avoir bû ; au contraire, s'il est pris après le repas, il lâche le ventre insensiblement & peu à peu sans l'offenser.
   
Couvert
  T. n.m. Logement où l'on est à l'abri des injures du temps. Il n'avoit que le couvert à l'hôpital, & il falloit que pour vivre, il mendiât son pain de porte en porte.
   
Cristallomancie
  T. n.f. Art de deviner, de connoître les choses secrètes & cachées, par le moyen d'un miroir, en les faisant voir dans un miroir. On dit qu'il y a des devins qui font voir dans un miroir la personne que l'on veut connoître ; par exemple, celui qui a volé, ou fait quelque autre chose que l'on veut savoir. C'est ce qui s'appelle Cristallomance,
   
Croisière
  T. n.f. En termes de marine, est une certaine étendue de mer, où les vaisseaux vont croiser & faire des courses. Etre en bonne croisière, c'est être en un bon endroit pour attendre les vaisseaux & pour les attaquer.
   
Dam
  T. n.m. Ce mot dans la langue flamande signifie une levée de terre, une sorte de digue pour retenir les eaux de la mer, d'une rivière, d'un canal. Il entre dans la composition d'un grand nombre de noms géographiques & est particulier aux villes des Pays-Bas. Ce mot désigne presque toujours un lieu situé sur une de ces digues, & l'on y joint d'ordinaire le nom de la rivière qui passe à cet endroit comme Rotterdam, Amsterdam, ou le nom de ceux qui l'ont faite, comme Monikendam, &c.
   
Dentifrice
  T. n.m. Terme de Médecine, qui se dit des remèdes avec lesquels on se frotte les dents. Il y en a de secs, dont quelques-uns sont en forme de poudre, composés avec les coraux, la pierre ponce, le sel, l'alun, les coquilles d'oeufs, d'escargots & d'écrevisses, la corne de cerf, l'os de sèche, &c. On en fait aussi en forme d'opiate avec ces mêmes poudres, en y ajoûtant du miel. Il s'en prépare encore avec des racines cuites avec l'alun, & séchées au four. D'autres sont en forme de liqueur, qu'on tire par distillation d'herbes desséchantes, & de médicamens astringens. Les Hollandois disent que le meilleur opiate, ou dentifrice, qui conserve les dents belles, est de les frotter avec du beurre. Les Espagnols les frottent avec de l'urine.
   
Dentifrice
  T. n.m. Terme de Médecine, qui se dit des remèdes avec lesquels on se frotte les dents. Il y en a de secs, dont quelques-uns sont en forme de poudre, composés avec les coraux, la pierre ponce, le sel, l'alun, les coquilles d'oeufs, d'escargots & d'écrevisses, la corne de cerf, l'os de sèche, &c. On en fait aussi en forme d'opiate avec ces mêmes poudres, en y ajoûtant du miel. Il s'en prépare encore avec des racines cuites avec l'alun, & séchées au four. D'autres sont en forme de liqueur, qu'on tire par distillation d'herbes desséchantes, & de médicamens astringens. Les Hollandois disent que le meilleur opiate, ou dentifrice, qui conserve les dents belles, est de les frotter avec du beurre. Les Espagnols les frottent avec de l'urine.
     
Dictateur
  T. n.m. Terme de collège. C'est le nom qu'on donne à celui qui a la première place. Il est au-dessus de ceux qu'on appelle empereurs & qui sont ordinairement les premiers. On ne peut être dictateur dans une classe, qu'on ait été plusieurs fois empereur.
   
Dispensaire
  T. n.m. En terme de médecine est le nom qu'on donne aux recueils qui ont été faits par divers auteurs d'un grand nombre de remèdes composés. C'est la même chose qu'Antidotaire.
   
Douche
  T. n.m. Qui ne se dit que dans les lieux où il y a des eaux minérales qu'on épanche sur la partie affectée pour la guérir. La douche se donne 12 à 15 jours durant, quand l'eau est fort chaude, & 20 à 25 jours quand elle ne l'est guère. On ne la donne jamais sur la tête.
   
Drogue
  T. n.m. Terme général de marchandise d'épicerie de toute sorte de nature, & sur-tout des pays éloignés, lesquelles servent à la Médecine, aux teintures & aux Artisans, comme sené, casse, mastic, borax, alun, brésil, sandaraque, &c. Lemery a publié en 1698. un Traité universel des drogues par ordre alphabétique. Les Apothicaires doivent avoir dans leur boutique toutes sortes de drogues. Il y a de certaines drogues qui ne sont point nourrissantes, lesquelles appaisent la faim pour quelque temps.
Ménage, après Saumaise, dérive ce mot de droga, qui a été fait du Persan droa, signifiant odeur, parce que les drogues aromatiques ont beaucoup d'odeur. Guichart le fait venir du mot Hébreu rakab, qu'il explique par préparer des parfums, des aromates, des onguents.
Drogue, se dit aussi des choses de peu de valeur qu'on veut mettre en commerce. Le fonds dont ce Marchand se veut défaire n'est que de rebut, ce n'est que de la drogue. Cet usurier en faisant un tel prêt en a donné la moitié en drogue, en méchans billets, méchans meubles, &c.
On dit proverbialement, qu'un homme sait bien faire valoir sa drogue, pour dire, qu'il est charlatan, qu'il sait vendre cher de mauvaise marchandise.
En 1543, François I fit un édit portant qu'on ne pourroit pas décharger les épiceries & drogueries qui seroient nécessaires au Royaume qu'en deux ports & havres de son état : savoir, pour celles par la mer Océane à Rouen & pour celle de la Méditerranée à Marseille.
   
Droguier
  T. n.m. Buffet d'un naturaliste curieux qui est divisé en plusieurs tiroirs & casses, en chacune desquelles il y a une drogue différente avec son étiquette.
   
Duel
 

T. n.m. Combat de particuliers assigné à certain lieu & heure, ensuite d'un appel ou d'un défi. Les duels étoient autrefois permis pour défendre ou accuser en Justice dans les cas dont on ne pouvoit avoir preuve. Ce duel étoit un moyen si ordinaire pour vuider les différends des Nobles, qu'on n'en dispensoit pas même les Ecclésiastiques, les Prêtres & les Moines. Et afin qu'ils ne se souillassent pas de sang, on les obligeoit de donner des gens pour se battre à leur place. On n'en exceptoit que les femmes, les malades & les méhaignés, & ceux qui étoient au-dessous de 21 ans, ou au-dessus de 60. La coutume ancienne étoit de faire entrer en champ clos deux champions par autorité des Juges ordinaires, non-seulement en matières criminelles, mais aussi en quelques civiles, pour le soutenement de leur droit. Cette coutume venoit originairement des peuples Septentrionaux, qui vuidoient tous leurs différends par les armes. La forme de ce combat étoit, que l'accusé & l'accusateur jettoient des gages en Justice de part & d'autre. Le Juge levoit premièrement celui du défendeur, & puis celui du demandeur. Après on les mettoit l'un & l'autre en prison, ou en sûre garde, & le Seigneur Haut-Justicier étoit tenu de leur fournir des armes sortables. Ceux qui combattoient à pied, n'avoient que l'épée & le bouclier. Les Chevaliers étoient armés de toutes pièces, aussi-bien que leurs chevaux. Le jour du combat ils choisissoient devant le Juge quatre Chevaliers pour la garde du camp, & faisoient plusieurs cérémonies, prières, sermens & oraisons. Le vaincu, soit accusateur, soit accusé, étoit puni de mort, ou de mutilation de membres, & étoit ignominieusement traîné hors du camp, pendu à un gibet, ou brûlé, suivant l'exigence du cas. On ordonnoit les épreuves du duel, parce qu'on croyoit par là consulter la Providence, pour discerner le coupable ; & l'on s'imaginoit que Dieu ainsi interrogé se déclaroit en faveur de l'innocent. Cependant il arrivoit si souvent que l'injuste accusateur demeuroit victorieux, que l'on a reconnu qu'il ne falloit point prescrire à sa sagesse la nécessité d'interrompre le cours des causes secondes. C'étoit donner des règles au meurtre, & déguiser l'assassinat en méthode, & en mesure. Le dernier duel fameux a été fait en l'année 1547. devant le Roi Henri II, au combat de Jarnac & de la Châtaigneraye, dont fait mention M. de Thou & Jean de Serres. Il s'en fit un autre durant la Ligue entre les Sieurs de Marolles & de Marivaux, mais ils étoient de partis contraires.

   
Echafaud
  T. n.m. Ouvrage de charpenterie élevé en forme d'amphithéatre pour y placer des spectateurs, afin de voir commodément quelque grande cérémonie. On fait de grands échafauds pour voir le carrousel. Toutes les rues étoient pleines d'échafauds à l'entrée de la Reine.
Échafaud, se dit aussi d'un petit théatre qu'on dresse en une place publique, sur lequel on roue les criminels, on coupe la tête à un Gentilhomme. Les méchantes actions conduisent un homme sur l'échafaud, elles lui font laisser la tête sur un échafaud.
Échafaud, se dit aussi de ces planches soutenues par des tretaux, ou par des pièces de bois fichées dans un mur, sur lesquelles se mettent des Maçons, des Sculpteurs, des Peintres, pour travailler en des lieux élevés, murs, plafonds, & autres choses. Il s'en fait aussi d'assemblage de charpente pour le haut des clochers ou flèches. Il y a aussi des échafauds volans qui s'appliquent contre le mur, avec des cordes, dont se servent les Couvreurs & Sculpteurs.
   
Echillon
 

T. n.m. Terme de Marine de Levant. C'est une nuée noire, d'où sort une longue queue qui va toujours en diminuant, & qui s'allongeant dans la mer, en tire l'eau comme une pompe avec tant de violence, qu'on voit bouillonner l'eau tout alentour. Les Mathelots craignent plus que toute autre tempête cet étrange météore. Ils croient qu'en piquant dans le mât un couteau à manche noir, cela détourne l'orage, tant ils poussent loin la superstition. C'est presque la même chose que ce que sur l'Océan on appelle siphon.

   
Ecriteau
  T. n.m. Titre ou inscription en grosses lettres qu'on met sur quelque chose pour en donner connoissance. Les boêtes d'Apoticaires ont des écriteaux pour faire connoître les drogues qui sont dedans. On met des écriteaux aux gens qu'on fustige, pour marquer la cause de leur suplice. On met des écriteaux aux maisons qui sont à vendre, à louer, aux chambres garnies.
   
Embabouiner
  T. v. Amuser quelqu'un de belles espérances, se rendre maître de son esprit. C'est à faire aux sots à se laisser embabouiner par les femmes. Il s'est laissé embabouiner par ce hableur qui lui promettoit de faire sa fortune. Ce mot est populaire, & vient de babouin, comme qui diroit traiter quelqu'un en sot, en enfant, en petit babouin.
   
Emballage
 

T. n.m. Action d'empaqueter, de mettre en balles.Il faut compter les frais de l'emballage sur les marchandises. L'emballage apporte toujours quelque tare ou déchet. Il faut diminuer sur les marchandises le poids de l'emballage. Dans le deuil, le bonnet des Chinois a une figure tout-à-fait bizarre ; il est d'une toile de chanvre rousse, & fort claire, à peu-près comme notre toile d'emballage.

   
Embrocation
 

T. n.f. Terme de Pharmacie, se dit des remèdes, huiles, décoctions, ou autres liqueurs qu'on applique, ou qu'on fait pleuvoir sur les parties malades ; qui ne font que des espèces de lotions. Elle est maintenant de peu d'usage, si ce n'est pour les maux de tête. On l'appelle aussi irrigation. Si la douleur ne cesse point, faites une embrocation de lait de vache tiède sur la tête. On fera une embrocation sur la partie avec de l'huile de lis bien chaude, ou avec de l'onguent althaea. La douche qu'on prend dans les bains naturels, est proprement une embrocation.

   
Emeri(l)
  T. n.m. Pierre métallique qui se trouve dans toutes les mines, particulièrement en celles de cuivre, de fer & d'or. Elle est rouge & quelquefois grise, fort pesante & très-dure, & sert à polir & brunir l'or, & aussi à caver & à couper le verre, à tailler le marbre & les pierreries, à la réserve du diamant. Quand l'émeri est fondu avec le plomb & le fer, il les endurcit, & il augmente même le poids & la couleur de l'or, & il le fait devenir rouge. On en mêle un peu à l'or de Madagascar, qui est pâle, & qui se fond facilement, sans y ajoûter du borax, comme on fait à l'autre. L'émeril sert à polir le fer & les miroirs d'acier. Il se réduit en une poudre imperceptible dans de l'eau-de-vie ou de l'esprit de vin.
   
Emmiellure
 

T. n.m. Onguent dont se servent les Ecuyers & les Maréchaux pour guérir les blessures ou écorchures des chevaux. Il est fait d'un mélange de miel, de graisse, de térébentine, & d'autres drogues, & on en frotte les parties incommodées, enflées, foulées, &c.

   
Empasmé
  T. n.m. C'est une poudre qu'on répand sur le corps pour en corriger la mauvaise odeur & pour empêcher les sueurs inutiles.
   
Encyclopédie
 

T. n.f. Science universelle ; recueil, ou enchaînement de toutes les sciences ensemble. C'est une témérité à un homme de vouloir posséder l'Encyclopédie. Ce mot a vieilli, & n'est plus en usage que dans le burlesque. Les Grecs appelloient , la connoissance des sept Arts libéraux, la possession de toutes les sciences. Les Grecs ont dit aussi, ce qui rend ordinairement ridicule le projet de l'encyclopédie, c'est que ceux qui l'entreprennent se contentent de savoir un peu de tout, & assez superficiellement. Il vaut mieux s'en tenir à une seule chose, & tâcher de la bien posséder.

   
Endroit
  T. n.m. Lieu. On demande comment il faut prononcer ce mot. Le mieux est de prononcer endrouet, & endrouêts au pluriel, mais dans le discours ordinaire, & même généralement on prononce endret, & au pluriel endrêts. Cette usage est si universel, qu'on ne peut condamner cette prononciation.

Endroit. Il se dit aussi du corps. Voilà l'endroit où il est blessé.
Il se dit aussi des choses qu'on mange & qu'on coupe. Donnez-moi de cet endroit-là.
On dit figur. Prendre quelqu'un par son endroit sensible, pour dire, le prendre par ce qui l'intéresse le plus.

Le côté le plus beau, le plus doux, le plus uni, le plus brillant d'une étoffe, d'une toile, &c. Il est opposé à l'envers. L'endroit d'un velours, d'un satin, d'un brocard. La plupart des étoffes, des tapisseries, ne se travaillent pas par l'endroit, mais par l'envers.

   
Energumène
 

T n. m&f. Terme dogmatique dont se servent les Ecclésiastiques, pour signifier un possédé du Diable & du malin Papias dit que ce sont des furieux qui contrefont les actions du Diable, & font des choses qu'on croit être surnaturelles.

   
Enerver
 

T. v. Faire perdre aux nerfs leur force, leur usage, leur fonction, soit en les coupant, ou en les affoiblissant par les débauches, ou par quelque autre violence. Quand on veut rendre des chevaux inutiles on les énerve, on leur coupe les nerfs. La jeunesse s'énerve par la débauche des femmes. Le vin énerve, affoiblit les nerfs.
Énerver, se dit figurément en Morale, & signifie Amollir, affoiblir. L'oisiveté, & les plaisirs énervent le courage. L'affliction, la nécessité, énervent l'esprit, émoussent toute sa vigueur.

   
Enleveurs de quartiers
  T. n.m. C'est ainsi qu'on appelle des soldats qui forcent, qui prennent & enlèvent d'autres soldats qui sont à l'armée logés dans leurs quartiers. Dieu vous garde, lorsque vous dormirez, de tous enleveurs de quartiers.
   
Entremets
  T. n.m. Plats de ragoût qu'on met sur la table entre les services & particulièrement entre le rôt & le fruit.
   
Entreprise
  T. n.m. Résolution hardie de faire quelque chose. C'étoit une hardie entreprise que celle du bâtiment de Saint Pierre de Rome. La traduction de la Bible est une entreprise bien difficile.
Entreprise, se dit aussi au Palais des attentats que font les Juges sur la jurisdiction les uns des autres, & sur l'autorité de leurs charges. Il y a tous les jours des procès en règlement pour les entreprises des Juges les uns sur les autres.
Entreprise, se dit encore en fait de Police, quand des compagnons d'un métier font des ouvrages qu'il n'appartient qu'aux Maîtres de faire ; ou quand des Maîtres d'un métier en font qui appartiennent à un autre métier. Il y a tous les jours à la Police des affaires pour les entreprises des Artisans.
Entreprise, en termes de Guerre, se dit d'un dessein qu'on forme, du devoir où on se met de surprendre, de conquérir une place, une Province, d'enlever un quartier, &c.
Entreprise, se dit aussi des desseins qu'on a sur la vie de quelqu'un. Les méchans font des entreprises sur la vie des gens de bien.
On dit en termes de Chasse, qu'un chien ou qu'un oiseau est de grande entreprise ; pour dire, qu'il attaque hardiment le gibier. On disoit autrefois emprise pour entreprise, & emprendre pour entreprendre.
Entreprise, se dit fort aujourd'hui en matière de commerce, de finances, de traités, de contrats & d'achats, &c. Une grosse entreprise. Faire de grosses entreprises.
   
Escarpin
  T. n.m. Soulier à simple semelle, qui sert particulièrement pour la danse, & pour la propreté : chausson de cuir que l'on portoit autrefois dans des mulles, & qu'on porte encore dans des sabots. Comme l'escarpin est fort léger les Danseurs de corde s'en servent. On dit de jolis escarpins : chausser l'escarpin.
D'où le verbe escarpiner, courir vite & légèrement comme on fait quand on est chaussé avec des escarpins, avec une chaussure commode.
   
Estrade
  T. n.f. Chemin public, ou de la campagne. On s'en sert en cette phrase militaire, Battre l'estrade, c'est-à-dire, Envoyer des Cavaliers aux nouvelles, à la découverte des ennemis.
Il vient de l'Italien strada, qui signifie rue, ou chemin, qui est dérivé du Latin strata, qui signifie rue pavée.
On dit proverbialement, Battre l'estrade, pour dire, aller en divers pays, en diverses provinces : le peuple se sert de cette expression en parlant des garçons de boutique qui vont travailler de ville en ville, avant que de s'établir.
Estrade, est aussi une élévation de plancher qui se fait dans une alcove, ou dans la moitié d'une chambre, avec des ais cloués sur des lambourdes, pour en faire un réduit distingué & plus paré, afin d'y recevoir les gens apparens, & que l'on considère.
Dps
   
Evaltonner (s')
  T. v. Prendre des airs, des manières trop libres. Jeune homme, vous vous évaltonnez.
   
Fauteuil de poste
 

T. n.m. M. Duguet Ingénieur, a nouvellement inventé une machine sous le nom de Fauteuil de poste. On peut par le moyen de cette machine, dont la construction est simple & le mouvement aisé, faire un éxercice raisonnable sans sortir de sa chambre, & un éxercice d'autant plus utile, qu'il réunit tous les avantages des éxercices les plus vantés. On est exposé dans ce Fauteuil aux mêmes secousses qu'on éprouve dans une chaise de poste, de devant en derrière, de droit à gauche, & de haut en bas. Tantôt ces differens mouvemens se succédent de differentes façons ; tantôt ils concourent plusieurs à la fois. On peut à son gré les rendre plus brusques ou plus doux, plus prompts ou plus lents, plus violens ou plus foibles. on l'appelle aussi Trémoussoir, & celui qui s'en sert est nommé Trémousseur. Voilà de nouveaux mots pour la Langue.

   
Férier
  Vieux mot qui signifie fêter. Ce mot est encore en usage dans quelques provinces, comme en Limosin
   
Financer
  T. v. Fournir de l'argent aux caisses du Roi.
   
Flageolet
  T. n.m. Espèce de petite flute dont se servent les bergers, dont le son est clair & agréable. Il est fait de buis, d'ivoire, & de toute sorte de bois dur. Il a six trous, sans comprendre l'embouchure, la lumière, & celui de la patte, ou d'enbas. Un flageoleur est un joueur de flageolet.
   
Flibustier
 

T. n.m. Terme de Marine. C'est un nom qu'on donne aux Corsaires, ou Aventuriers qui courent les mers des Antilles, & de l'Amérique. Ce qui vient dé l'Anglois Flibet ; parce que les premiers Aventuriers François de l'Île de Saint Domingue faisoient leurs courses sur des flibots, qu'ils avoient pris aux Anglois. On dit aussi flibuster en prononçant l's, pour dire aller en course, pirater, être avec les Flibustiers. Ils disent encore aller en flibust, pour signifier la même chose. Il y en a qui écrivent & prononcent flibust.

   
Formidable
  T. adj. Qui fait peur, qui est à redouter.
   
Fusée
  T. n.f. Le fil qui est dévidé autour d'un fuseau. On envoie les femmes filer leur fusée, qui se veulent mêler des affaires des hommes. Cette bergère fait deux fusées de fil tous les jours.
Fusée, se dit figurément des affaires. On lui a fait un méchant procès : c'est une fusée qu'il aura bien de la peine à démêler. On a fait une forte ligue contre un tel Prince, c'est une fusée qui lui donnera bien de la peine.
Fusée, est aussi une pièce d'un feu d'artifice qui s'élève en l'air, & qu'on tire par divertissement dans les réjouissances publiques. Il y a des fusées volantes, & des fusées courantes. Une fusée à étoile, est celle qui a plusieurs petites boules de poudre à canon qui ressemblent à des étoiles quand elles sont enflammées. Une fusée à serpentaux, est une grosse fusée qui en enferme dedans quantité de petites. Le bruit de la fusée vient d'un creux qu'elle a tout au travers en longueur. Les petites fusées sont celles qui portent en leur embouchure ou orifice le diamètre d'une balle de plomb moindre d'une livre : les médiocres, celles qui portent une ou deux livres ; & enfin les grandes, celles dont les orifices portent depuis deux livres jusqu'à cent.
   
Garer
 

T. v. Qui ne se dit qu'avec le pronom personnel. Il faut se garer dans cette boutique pour laisser passer cet embarras. Garez-vous de ces taureaux qui viennent. Il est du langage populaire.
Garer, se dit aussi des bateaux qu'on lie, qu'on attache, qu'on amarre en des lieux où ils sont en sureté. L'Ordonnance des Eaux & Forêts veut que les épaves trouvées sur les rivières navigables soient garées sur terre, & les pêcheurs tenus d'en donner avis.

   
Garnisonnaire
 

T. n.m. Archer ou Sergent qu'on envoie dans une maison pour obliger les maîtres à payer quelque taxe ou deniers Royaux, ou pour être Gardien d'un scellé, ou des meubles saisis. Cette explication est tirée de Furetière au mot Garnison. Il se dit aussi d'un homme qui va en garnison de la part d'un Receveur des deniers du Roi, chez des débiteurs, pour y vivre jusqu'à ce qu'ils ayent payé. Les Collecteurs qui ont des Garnisonnaires, les redonnent à leurs redevables, pour accélérer le payement de la dette, qu'on s'efforce d'acquitter, afin d'eviter les frais. En France anciennement après la mort d'un homme, on observoit en plusieurs lieux de mettre garnison de Sergens (qu'on appelloit Mangeurs) en sa maison, jusqu'à ce qu'il y eût heritiers apparens : en d'autres lieux, le Juge ne partoit point de la maison, qu'il n'eût fait inventaire ; & en d'autres, il se contentoit de sceller & enfermer les principaux meubles, & établir un Gardien au scellé. Et certainement c'étoit un désordre de mettre garnison en la maison d'un homme, soit de son vivant pour ses dettes soit après son décès faute d'héritiers apparens, car ce n'est pas conserver son bien, mais le manger. Aussi a-t-il été defendu par plusieurs Arrêts. On n'envoie plus de gens en garnison que pour contraindre les débiteurs au payement des deniers Royaux.

   
Gaudiveau
  T. n.m. Terme de Traiteur. Chair de veau hachée pour en faire un pâté. Un pâté de gaudiveau, ou de gaudiveaux. Mettre des gaudiveaux en pâte
   
Gibbecière
  T. n.f. Vieux mot qui signifioit autrefois une bourse large qu'on mettoit au-devant du ventre. Maintenant elle n'est en usage que parmi les charlatans qui font plusieurs tours de passe-passe, qu'on appelle tours de gibbecière. Ils ont plusieurs petites machines & inventions qu'ils tirent de leur gibbecière.
   
Gilles
  T. n.m. Ce mot en langage populaire a quelque chose de méprisant, & signifie un mais, un benêt, un badaud. Cela vient de ce que dans les farces & les Comédies des Foires, celui qui fait le personnage de niais & d'imbécille, se nomme Gilles.
   
Ginguet
  T. n.m. Petit vin qui n'a ni force, ni agrément au goût, mais qui est extrémement verd. Tout le vignoble d'Ivry, de Vitry, &c. ne produit que du ginguet, du vin à faire danser les chévres. C'est apparemment de ce nom qu'on appelle à Paris Guinguettes les petits Cabarets des environs de Paris, où le peuple & les artisans vont se divertir, surtout les jours de fêtes.
   
Grabataire
 

T. n.m. Terme de Liturgie & d'Histoire Ecclésiastique. On appelloit autrefois Grabataires ceux qui différoient à recevoir le baptême jusques à la mort, & qui ne le recevoient que lorsqu'ils étoient dangereusement malades, & sans espérance de vivre plus long-temps.

   
Grammaire
 

T. n.m. Art qui enseigne à bien parler, c'est-à-dire à bien exprimer ses pensées par des signes que les hommes ont institués.

   
Grammatiste
 

T. n.m. Celui qui enseigne aux enfans les principes des langues.

   
Grippe
 

T. n.f. Fantaisie, passion, inclination prédominante & forte. Ce Gentilhomme ne se contente pas des chevaux qui lui sont nécessaires, il a la grippe d'avoir toujours un grand nombre des plus beaux chevaux de France. Ce Curieux s'est ruiné en tableaux, c'étoit-là sa grippe. Cet homme ne sait rien, cependant il fait beaucoup de dépenses en livres, il amasse une fort belle bibliothéque ; voilà sa grippe. Un tel achette une Charge de Conseiller au Parlement à son fils ; c'est la grippe des gens d'affaire. On veut passer pour homme de qualité, c'est une grippe. C'est la grippe du siècle où nous vivons.
On appelle grippe, une passion forte, apparemment parce qu'elle nous saisit, nous prend, nous entraîne, se rend maîtresse de l'esprit & du coeur. Du reste, ce terme est bas, & n'est bon que dans la conversation & le style familier.

   
Grippe sou
 

T. n.m. nom burlesque qu'on a donné à de pauvres bourgeois qui gagnent leur vie à aller recevoir à l'Hôtel de ville les rentes pour autrui. On les appelle grippe-sou, à cause du sou pour livre qu'ils retiennent par leurs mains pour leur salaire.

   
Grisaille
 

T. n.f. Peinture faite de blanc & de noir, que les Peintres appellent autrement clair-obscur, de l'Italien chiaroscuro.
En terme de perruquier, on appelle encore grisaille, un beau mélange de cheveux blancs & bruns pour les perruques. C'est un assemblage qui fait une fort belle couleur claire, qui ne change point & se conserve fort longtemps.

   
Grivoise
  T. n.f. Sorte de tabatière faite en manière de rape pour réduire en poudre le tabac qui est en rouleau ; ces sortes de tabatières sont venues de Strasbourg en 1690. sans doute parce que les soldats, ou grivois s'en servent, & depuis sont devenues fort à la mode, même parmi les gens de Qualité & les personnes les plus sérieuses.
Grivoise, est aussi une fille libre, qui vit en débauche avec les grivois, les Soldats, ou les gueux.
   
Grumer
 

T. v. Terme de Coutumes. Les bêtes grument, lorsqu'il paroît par leur fiente qu'elles ont mangé des raisins dans les vignes. Les bêtes qui grument son confisquées dans quelques Provinces.

   
Guichet
 

T. n.m. Petite porte auprès d'une plus grande, ou qui fait partie de la grande. Quand les portes de la ville sont fermées, on entre par le guichet. Il faut fermer la porte cochère, & entrer par le guichet.

Guichet, se dit aussi d'un petit passage dans une ville.
Guichet, se dit aussi des petites portes d'une prison. Quand un prisonnier est écroué, on lui fait passer le guichet. Il est défendu de garder un prisonnier vingt-quatre heures entre deux guichets.
Guichet, signifie aussi, le volet qui ferme une fenêtre, une armoire.
Guichet, est encore une petite ouverture à la porte des cabarets pour donner du vin la nuit, quand on ne veut pas ouvrir la porte du cabaret.

   
Guichetier
 

T. n.m. Valet d'un Géolier commis à la garde des guichets de la geole, & qui a soin d'enfermer & garder les prisonniers.

   
Guide des pêcheurs
 

T. n.m. Les Fiacres à glaces de bois, c'est-à-dire, qui sont tout fermés jusqu'au haut des portières, se nomment des Guides des pécheurs, à cause que ces sortes de voitures servent aux jeunes gens à mener des Donzelles à la campagne pour se divertir. Ceux qui ont des intrigues de galanterie s'en servent pour n'être pas connus, ni vus, parce que ces sortes de carrosses de louage n'ont pas les armes de ceux qui sont dedans, & sont entièrement fermés, au moins de trois côtés.

   
Guidon
 

T. n.m. Drapeau ou étendard d'une compagnie de Gendarmes, & de plusieurs compagnies de Cavalerie. Il est large par un bout, & se termine en une pointe de l'autre côté, qui est divisée en deux comme les banderoles. Les Gendarmes du Roi ont un guidon. Les Archers de la ville, les Sergens à cheval dans leurs montres portent un guidon.
Guidon, est aussi l'Officier qui porte le guidon. Guidon se prend aussi pour l'Office, la Charge de Guidon. Le Roi lui a donné l'agrément pour le Guidon des Gendarmes.

   
Haireux
  T. adj. Temps froid & humide, accompagné de brouillards & de frimats, qui fait grelotter, & qui est plus incommode que la grande gelée.
   
Herbé
  T. pp. Terme de commerce de cheveux. On appelle Cheveux herbés, des cheveux châtains que l'on a fait devenir blonds en les mettant sur l'herbe, & les y laissant long-temps exposés au soleil, après les avoir fait passer plusieurs fois dans une lessive d'eau limoneuse.
   
Hospice
  T. n.m. Petit Couvent que des Religieux bâtissent en une ville pour y recevoir les étrangers du même Ordre qui auront besoin d'y venir séjourner quelque temps. Cette maison n'est pas une ancienne fondation, ce n'est qu'un hospice bâti depuis peu. La pluspart des hospices deviennent en peu d'années de grands Couvens fixes & bien rentés. Quelquefois hospice signifie la partie d'un Monastère, d'un Couvent, où est le logement destiné à recevoir les hôtes.
Hospice, se dit aussi d'une maison bâtie dans une grande ville pour y retirer pendant la guerre, & dans des temps fâcheux, les Religieux & les Religieuses des Couvens bâtis dans la campagne.
   
Impatroniser
  T. n.m. Qui ne se dit qu'avec le pronom personnel. S'emparer, se rendre insensiblement maître de quelque chose. Depuis qu'une communauté s'est impatronisée d'une maison, d'un héritage, il est bien difficile de l'en chasser.
   
Implexe
  T. n.m. C'est une épithéte que l'on donne aux Poëmes Épiques & aux piéces de Théâtre où il arrive des changemens de fortune extraordinaires aux Héros de la piéce. M. Adisson dit dans ses remarques sur le Poëme du Paradis perdu de Milton, que la fable est simple ou implexe. On la nomme simple, quand il n'y a point de changement de fortune ; implexe quand la fortune des principaux Acteurs change de bien en mal, ou de mal en bien. La fable implexe, continue-t-il, est estimée la plus parfaite, parce qu'elle est plus propre à émouvoir les passions.
   
Improuver
  T. n.m. Condamner, désapprouver. L'Église improuve les bals, & les assemblées nocturnes, qui sont des occasions de péché. Les délicats improuvent plusieurs mots par caprice, qui sont bien François, & nécessaires dans la langue. On se laisse aller par complaisance à faire plusieurs choses qu'on improuve. que l'on condamne soi-même.
   
Incahotable
  T. n.m. Qui ne cahote point, qui ne secoue point. Ce mot est nouveau, & commence à se dire de certains carrosses bien suspendus qui ne secouent point ceux qui sont dedans, qui ne cahotent point, où l'on ne sauroit être cahoté. Carrosse incahotable. Ma chaise est incahotable.
   
Industrie
  T. n.m. Adresse à faire réussir quelque chose, quelque dessein, quelque travail. Cette montre est travaillée avec bien de l'industrie. Il a fallu beaucoup d'industrie pour l'inventer. Ce pauvre homme n'est capable d'aucun emploi, il n'a point d'industrie. Les hommes se sont assemblés en société afin de jouir des secours de leur industrie mutuelle, dont les besoins de la vie ont rendu le commerce nécessaire. Vous ne devez rien de votre beauté à votre industrie ; la nature a pris tous les soins.
   
Infirmerie
  T. n.m. Dans les hôpitaux on ajoûte au soulagement du corps la conduite de l'âme : mais après tout, la fin immédiate & directe de ces maisons de charité, & si j'ose ainsi m'exprimer, de ces infirmeries publiques, c'est la santé du corps.
Infirmerie se dit d'un grand bâtiment où l'on dépose les marchandises infectées de la peste, pour les désinfecter. Les Portefaix, commis dans l'Infirmerie à la purge des marchandises & du vaisseau, moururent presque tous.
   
Institut
  T. n.m. Règle qui prescrit un certain genre de vie. Tous les Ordres religieux ont chacun leur institut particulier. Les Ordres de Chevalerie ont aussi chacun leur institut.
   
Instituteur
  T. n.m. Celui qui établit une société avec une certaine règle & manière de vie. S. Bruno est le Fondateur & Instituteur de l'Ordre des Chartreux. Saint Augustin ne fut jamais ni Religieux, ni Instituteur d'aucun Ordre.
   
Interner
  T. n.m. On a voulu introduire depuis peu ce terme, & un des plus grands Magistrats du Royaume, pour dire qu'il s'étoit lié d'amitié avec une personne en qui il avoit pris une confiance singulière, disoit que son coeur s'étoit interné avec celui de cet ami. L'expression seroit énergique, si elle étoit reçue.
   
Intolérant
  T. n.m. Celui qui a de l'intolérance ; celui qui ne veut ni tolérer, ni supporter les autres ; c'est-à-dire, ne les point admettre à la communion de prières & à la participation des Sacremens. C'est le nom que les Tolérans donnent à ceux qui font profession de quelque communion Chrétienne, & par-dessus tous aux Catholiques qu'ils regardent comme les plus intolérans de toutes les sociétés Chrétiennes ; parce qu'effectivement les Catholiques gardent mieux que personne le précepte de Jésus-Christ, qui nous ordonne de traiter comme Payen & comme Publicain celui qui n'écoute point l'Église. En ce sens il n'y a même, à proprement parler, que les Catholiques dont les principes sont intolérans, parce qu'il n'y a qu'eux qui ont les vrais principes.
   
Invendu
  T. adj. Ce mot est bien nouveau. & ne doit pas être hasardé que tout au plus dans le satyrique & le comique. Il signifieroit non vendu, qui n'a pas été vendu.
   
Investigateur
  T. n.m. En termes du Grand Art on appelle Investigateurs ceux qui cherchent la pierre philosophale.
   
Irroration
  T. n.f. Sorte de transplantation dont on se sert pour la cure de certaines maladies. L'irroration consiste à arroser tous les jours des arbres ou d'autres plantes convenables avec l'urine, les sueurs, les selles, ou les lavures du membre malade, ou de tout le corps, séparément, ou conjointement, jusqu'à la guérison entière de la maladie. Après qu'on a arrosé, il faut aussitôt jetter de la terre nouvelle dessus, afin d'empêcher que l'air ne dissipe la vertu de la munie, c'est-à-dire, de l'esprit vital qui est contenu dans les choses avec quoi on arrose.
   
Karmesse
  T. n.f. C'est le nom de certaines foires de Hollande & de Flandre où l'on va se divertir. On y court la mascarade, & on y fait mille extravagances.
   
Lampadaire
  T. n.m. Nom d'un Officier, de l'Église de Constantinople. Le Lampadaire avoit soin du luminaire de l'Église ; il portoit un bougeoir devant le Patriarche, devant l'Empereur & l'Impératrice, quand ils étoient à l'Église, ou qu'ils alloient en procession. La bougie qu'il portoit devant l'Empereur étoit entourée de deux cercles d'or en forme de couronne ; celle qu'il portoit devant l'Impératrice, & devant le Patriarche, n'en avoit qu'un. Cette cérémonie fut établie pour avertir des personnes d'un si haut rang, que leur lumière doit éclairer ceux qui leur sont soumis.
   
Lampion
  T. n.m. Petit vaisseau de terre où l'on met de l'huile, ou de la graisse, pour brûler. On fait des illuminations avec 10 ou 12000 lampions. Il y a aussi des lampions de verre qui sont suspendus au milieu des lampes d'argent entre le panaché & le culot, & c'est-là où l'on met l'huile qui brûle. Lampion à parapet, est un vaisseau de fer où l'on met du goudron & de la poix pour brûler, & pour éclairer la nuit sur le parapet dans une ville assiêgée. On se sert sur mer de lampions qu'on met dans les lanternes, quand on va dans les voûtes aux poudres.
   
Languier
  T. n.m. Partie d'un cochon, qui contient la gorge & la langue, qu'on sale & qu'on met à la fumée. Les languiers du Mans sont en grande réputation chez les goinfres.
   
Lanquerre
  T. n.f. Peau en forme de gros & large bourlet, qui se met au-dessous des reins en forme de ceinture, & qui soutient un homme sur l'eau.
   
Lavabo
  T. n.m. Terme d'Église, & d'Imager. Carte qu'on met au côté droit de l'autel, où sont écrites ces paroles, Lavabo inter innocentes manus meas, &c. Mettre le lavabo où il doit être.
Lavabo, se dit aussi de l'action des Prêtres qui se lavent les mains, en disant la Messe, & de la partie de la Messe où cette action se fait. La Messe en étoit au lavabo, quand je suis arrivé. Il a fallu en entendre une autre.
   
Lavage
  T. n.m. Eau ramassée qui lave. Lorsque les égouts sont encombrés & qu'il pleut, il y a bien-tôt un grand lavage d'eau dans les rues. Un seau d'eau répandu dans une chambre fait un grand lavage.
Lavage, est aussi l'action de laver. On recommande aux Palfreniers le lavage des piés des chevaux. Les eaux grasses sont bonnes pour ce lavage.
   
Lavange
  T. n.f. Amas de neiges qui se détache tout-à-coup des montagnes & des hauts rochers & qui est fort dangereux pour ceux qui se trouvent dans les vallées. Un petit peloton de neige qui roule le long d'une haute montagne grossit tellement, qu'il forme une lavange. On les nomme ainsi en Dauphiné ; mais vers Briançon & Pignerol on les nomme avalanges, ou avalanches.
   
Légal
  T. n.m. Qui vit bien, & selon les loix, qui ne fait tort à personne, qui est loyal, fidèle, plein de probité. Ce Marchand est franc & légal ; il ne trompe point, il vend de bonnes marchandises, il est de bon compte. On dit au Palais, qu'il y a des peines légales, c'est-à-dire, qui sont imposées par les loix ; d'autres arbitraires, qui dépendent de l'opinion des Juges. Contrariété légale.
   
Lessive
  T. n.f. Prononcez lécive. Ce qui sert à blanchir le linge sale. L'action de la lessive se fait par la vertu des sels, des cendres de bois neuf, de soude ou de gravelée, qu'on met dans un charrier sur un cuvier plein de linge. La dissolution des sels se fait par de l'eau chaude qu'on verse plusieurs fois dessus, & par leur acrimonie ils détachent & emportent toutes les graisses & ordures qui y étoient attachées ; & c'est cela qu'on appelle, Couler la lessive. Le jour d'après on lave le linge en grande eau, pour en détacher les sels qui y pourroient être restés, & qui causeroient de grandes démangeaisons sur la peau.
   
Libéral
  T. adj. Qui donne abondamment, mais avec raison & jugement, ensorte qu'il ne soit ni prodigue, ni avare : car le libéral qui va trop loin, devient prodigue. Il y a bien des gens qui donnent beaucoup, & qui ne sont point libéraux. Un homme libéral, à le bien définir, est le martyr de sa vanité. Celui-là est véritablement libéral, qui choisit par préférence des sujets où le mérite & la vertu se trouvent joints à la mauvaise fortune.
   
Licenciement
  T. n.m. Qui ne se dit guère que des troupes & des soldats à qui on donne congé. Quand la paix est publiée, on fait le licenciement des troupes.
   
Lienterie
  T. n.f. Espèce de dévoiement dans lequel on rend les alimens comme on les a pris, ou à demi digérés. La lienterie vient de ce que le levain de l'estomac manque entièrement, ou est émoussé, ou parce que le pylore est tellement relâché, & les fibres du ventricule si fort irritées en même temps, qu'il laisse sortir les alimens, au lieu de les retenir. La lienterie survient à de grandes maladies. L'excès de la boisson peut causer ce mal en relâchant trop l'estomac, & sur-tout le pylore. Les Anciens croient que la lienterie arrive, lorsque les intestins étant trop unis & glissans par-dedans, ils laissent échapper les alimens avant qu'ils soient digérés ; d'où vient qu'ils lui avoient donné ce nom, qui est Grec, & qui est formé de poli, & de intestin.
   
Lieux
  T. n.mpl. Latrines. Il ne se trouve point de preuves dans les écrits ni dans les bâtimens qui nous restent des Anciens, qu'ils eussent dans leurs maisons des fosses à privé. Ce qu'ils appelloient Latrinae, étoit un lieu public, (il y en avoit plusieurs de cette espéce à Rome) où alloient ceux qui n'avoient point d'Esclaves pour vuider & laver leurs bassins : ces bassins s'appelloient aussi Latrinae, à lavando, selon le sentiment de Varron. Les latrines publiques étoient en divers lieux de la ville ; on les nommoit encore Sterquilinia : elles étoient couvertes & garnies d'éponges, comme nous l'apprenons de Sénéque dans ses Épîtres. Ils avoient pour la nuit la commodité des eaux qui couloient dans toutes les rues de Rome, où ils jettoient les ordures. Les gens riches avoient des bassins que les Valets avoient soin de vuider dans les égouts, dont toutes les eaux se rendoient dans le grand cloaque, & de là dans le Tibre.
   
Lingerie
  T. n.m. Marchandise de linge & de toiles. Ce Marchand fait grand trafic de lingerie. Cette fille entend bien la lingerie, travaille bien en linge.
Lingerie, ce mot se dit aussi du lieu où sont les boutiques des Lingers, des Lingères. Allez à la lingerie, vous y trouverez tout ce qu'il vous faut. Rue de la Lingerie, est le lieu où il se vend le plus de toiles, de linge.
Lingerie. Ce mot est aussi usité dans quelques Communautés & Maisons Religieuses, pour signifier le lieu où l'on met le linge blanc, & le linge sale. Il faut porter ce linge à la lingerie.
   
Loge
  T. n.f. Sorte de hutte, petit lieu serré où l'on se retire en quelques occasions. Les Bergers qui parquent, ont une petite loge roulante. Les Hermites se font de petites loges dans les bois. Dans les Hôtels il y a la loge du Portier, Dans les basses-cours celle du dogue.
Les Facteurs d'orgue appellent aussi loge, le lieu où ils posent leurs soufflets.
Loge, se dit quelquefois sur mer de l'appartement de certains Officiers. Loge de l'Aumonier, loge du Maître-Canonnier.
Loge, se dit aussi d'une petite boutique qu'on loue pour un temps, ou pendant une foire. Il y a quatre cents loges à la Foire de St Germain des Prés. Les meilleures loges de la Foire sont celles des encognures à pan coupé.
   
Longimétrie
  T. n.f. Art de mesurer les longueurs, tant accessibles, comme un chemin, qu'inaccessibles, comme un bras de mer. C'est une partie de la Trigonométrie, & une dépendance de la Géométrie, de même que l'Altimétrie, la Planimétrie, Stéréométrie, &c.
   
Lopin
  T. n.m. Terme populaire, qui signifie, Morceau de chair, ou de pain, qu'on attrape, dont on se saisit à la hâte, ou avec avidité, & le plus souvent à la dérobée. De-là vient Hapelopin, qui attrape ce qu'il peut dans les cuisines. J'ai si bien fait que j'en ai attrapé un bon lopin.
   
Lorgnette
  T. n.f. On fait des éventails à Paris, dans le milieu desquels il y a une petite ouverture garnie de verre ou d'un petit treillis, par le moyen duquel les Dames voient sans être vûes, & ces ouvertures s'appellent des Lorgnettes.

Loupe dont se servent ceux qui ont la vue basse, & ceux qui veulent considérer avec exactitude certains objets, comme des médailles, des pierres gravées, &c. Il y a deux sortes de lorgnettes ; les unes ont deux verres enfermés dans un petit étui, moins long que le doigt ; elles ne servent qu'à ceux qui ont la vue basse ; c'est une espèce de lunette d'approche : les autres ne sont qu'une loupe entourée d'un cercle de corne, ou d'écaille, avec un petit manche. Celles-ci s'appellent toujours aujourd'hui loupes, & jamais lorgnettes.

   
Loterie
  T. n.f. Jeu de hasard, où l'on met des lots de marchandises, ou des sommes d'argent. On mêle plusieurs billets noirs & blancs ; sur les uns sont inscrits les lots mêmes, ou les numero qui marquent un bon lot, & sur les autres rien : chacun en achette telle quantité qu'il lui plaît à un certain prix. Ces billets sont ensuite distribués au sort ; quelques-uns tirent de bons lots, ou les bons billets, & la pluspart des autres, rien du tout. Il s'est fait plusieurs loteries en Angleterre & en Hollande par permission du Magistrat. On en a fait aussi plusieurs en France par permission du Roi, en faveur des Hôpitaux, &c. Tirer une loterie, ouvrir une loterie, fermer une loterie. M. le Clerc a fait un petit Traité sur ce qu'il peut y avoir de louable ou de blamable dans les loteries.
   
Lustucru
  T. n.m. Terme de mépris. Nom injurieux qu'on dit des personnes : il signifie, vil, méprisable, léger, qui n'est de nulle considération. Ce terme est bas & populaire. C'est un beau lustucru.
   
Macérer
  T. v. Mortifier son corps, en le privant des plaisirs sensuels. Les grands Saints se sont macérés par de longues abstinences, des austérités, des disciplines, des haires, en tourmentant & affligeant leurs corps.
   
Magnanime
  T. adj. Ce mot vieillissoit du temps de Vaugelas, dont il avoit un extrême regret ; mais il s'est rétabli. Il signifie, Qui a une grandeur d'ame & de courage, qui l'élève au-dessus du commun des hommes. Il signifie beaucoup plus que brave & vaillant. Le magnanime est orné de toutes les vertus, & les éxerce d'une manière sublime. Les actions fortes & résolues donnent de l'admiration, parce qu'elles ressemblent aux actions magnanimes. Il ne faut pas être orgueilleux en prétendant être magnanime.
   
Mail
  T. n.m. Jeu d'exercice, où l'on pousse avec grande violence & adresse, une boule de buis qu'on doit faire à la fin passer par un petit arc de fer qu'on nomme la passe. Le Mail est un jeu honnête aussi bien que la Paume. Il y a quelques endroits où l'on appelle ce jeu Pale-mail.
Mail, se dit aussi de l'instrument avec lequel on pousse la boule, qui est une petite masse de bois fort dure & ferrée, qui a un long manche & fort pliant. Il est venu en passe en trois coups de mail.
Mail, se dit aussi d'une allée d'arbres battue & bordée, & fermée de planches, dans laquelle on joue au Mail. En beaucoup de villes on va se promener au Mail. Daviler veut qu'un Mail soit une allée d'arbres de trois ou quatre cents toises de long sur quatre à cinq de large, bordée d'ais attachés contre des pieux à hauteur d'appui, avec une aire de recoupes de pierres, couverte de ciment, où l'on chasse des boules de buis avec un Mail ou maillet ferré à long manche. Le Mail de Saint Germain en Laye est un des plus beaux, parce que les arbres qui le bordent, sont de haute futaye. Celui de Paris est près de l'Arsenal. Les boules s'appellent des boules de mail.
   
Mari
  T. n.m. Celui qui est joint & uni à une femme par un contrat civil, & avec les cérémonies de l'Église. Les femmes en France sont sous la tutelle perpétuelle du mari ; elles ne peuvent faire aucun acte sans être autorisées par leur mari. Le mari est maître de la communauté. Mettre le fer entre les mains d'un mari pour venger son propre honneur, ce n'est pas violer les loix, c'est les observer. En prenant un mari, on prend un maître. Une femme se défait d'un Galant quand elle veut ; mais il faut qu'elle garde un mari tant qu'il dure. Il semble qu'aujourd'hui un mari se fait une ridicule honte d'aimer sa femme, & que la tendresse conjugale soit une pratique bourgeoise.
   
Menstrues
  T. n.fpl. Les purgations ordinaires des femmes qui leur viennent tous les mois. Quand l'Écriture veut parler d'abomination & d'impureté, elle se sert de cette expression. On les appelle aussi males semaines, parce qu'elles coulent pendant une semaine aux femmes oisives & gourmandes. On leur donne aussi les noms de mois, de règles, des temps, des fleurs rouges
   
Merlin
  T. n.m. On donne ce nom aux Magiciens & aux Sorciers. Et l'on s'en sert pour signifier un grand Magicien, ou un grand Sorcier. Il vient de ce Merlin Enchanteur ou Magicien si fameux dans l'histoire d'Angleterre du cinquième siècle. Il étoit issu, dit-on, du commerce d'une Dame Angloise avec un de ces Démons, à qui on donne le nom d'Incubes.
   
Moche
  T. n.f. Soies en moche. Ce sont des soies non encore teintes, & qui n'ont point eu tous leurs appréts. On les nomme Moches de la forme qu'ont leurs paquets.
Moche. Il se dit aussi dans le commerce des fils, de certains écheveaux de fil en paquets du poids de dix livres chacun. Ils se tirent de Rennes en Bretagne, & ne sont point tords.
   
Modiste
  T. adj. Qui affecte les modes, qui s'attache à suivre les modes. C'est un terme factice, & formé sur l'analogie de Thomiste, Scotiste, Janséniste, Quiétiste ; mais il n'est pas usité.
   
Moisissure
  T. n.f. Corruption de ce qui est moisi, petite barbe blanche ou verte, qui vient sur les corps qui se gâtent, qui se corrompent par quelque humidité. C'est une chose curieuse de voir par le microscope la moisissure. C'est une espèce de pré qui pousse des herbes & des fleurs, les unes en boutons, les autres épanouies, & les autres passées, chacune ayant sa racine & sa tige ronde, longue & transparente, dont la substance ressemble à celle des champignons.
   
Momerie
  T. n.f. Mascarade, boufonnerie, déguisément de gens masqués pour aller danser, jouer, ou se réjouir.
   
Mondain
  T. n.m. Qui suit les maximes, qui a l'air, qui court après les plaisirs du monde. Dieu se moque de la politique des mondains. Les mondains n'envisagent que de la tristesse & de l'ennui dans la paisible tranquillité de la vie privée.
Confirmer les mondains dans leurs fausses maximes.
Mondain, aine. Est aussi adject. On ne sait que trop combien l'austérité du jeûne est redoutable à la délicatesse des hommes mondains. Fl. Cette dévote a l'esprit trop mondain. Il faut quitter toutes les affections mondaines, pour vivre selon l'Évangile. Les plaisirs mondains, les hommes mondains ne sont que vanité. Mondain est souvent opposé à religieux, à celui qui a quitté le monde ; mais en ce sens il se prend toujours en mauvaise part : un homme mondain n'est pas simplement un séculier, un homme qui vit dans le monde, mais un homme qui est entêté de l'amour des biens du monde, &c.
   
Moquoiseau
 

T. n.m. C'est une sorte de cerise, qui a été ainsi appellée, parce qu'elle ne rougit point, & que les oiseaux la voyant blanche, croient qu'elle n'est pas mûre ; & dans cette créance, ils ne la mangent point. C'est un mot d'Anjou.

   
Morbide
  T. adj Terme de Peinture. Il se dit particulièrement de la chair grasse, & vivement exprimée.
   
Morgue
  T. n.f. Le second guichet où l'on tient quelque temps ceux qui entrent en prison, afin que les Guichetiers les regardent fixement, & s'impriment si bien l'idée de leur visage dans leur imagination, qu'ils ne puissent manquer de les reconnoître. Tenir un prisonnier à la morgue.
On appelle aussi morgue, un endroit au Châtelet, où les corps morts dont la Justice se saisit, sont exposés à la vue du public, afin qu'on les puisse reconnoître. On les y laisse plusieurs jours et les Religieuses de l'hôpital de Ste Catherine sont obligées de faire enterrer les corps morts trouvés & qui ont été exposés dans un lieu nommé la morgue.
Morgue, se dit figurément d'un regard fixe & sévère, par lequel il semble qu'on veuille braver quelqu'un, ou bien qui témoigne de l'orgueil, de la présomption.
   
Morguer
  T.v. Regarder fixement un prisonnier afin de le reconnaître. Le guichetier tenant le guichet de la morgue s'appelant morgueur. Dans les grandes prisons il y en a au moins deux.
   
Musette
  T. n.f. Instrument à vent & à anche, portatif, qui sert à faire une musique champêtre. La musette a les mêmes parties que la cornemuse, mais son bourdon est fort différent ; car il porte quatre anches sur un cylindre, dont on ouvre, & on ferme les trous, ou raynures par des morceaux de bois, ou d'ivoire, qui se nomment layettes. On enferme les quatre anches dans une boëte, avant que de les enfoncer dans la peau de la musette, afin qu'elles ne s'altèrent point en heurtant contre elles. Son chalumeau a onze trous, dont il y en a quelques-uns qu'on bouche avec une clef mobile, comme celle des autres flûtes. Le bourdon de la musette a cinq trous différens, avec lesquels il fait toutes les parties.
   
Néologisme
  T. n.m. Recherche d'expressions nouvelles & inutiles. Tous les bons Auteurs se sont récriés contre le néologisme de nos nouveaux Ecrivains. Si les habiles Ecrivains ne s'étoient pas roidis, & n'avoient pas frondé une quantité de petits Auteurs de balle qui affectoient mille termes de leur invention, & des tournures de phrase extraordinaires, ils auroient gâté & corrompu toute la pureté & l'excellence de notre langue par leur précieux & ridicule néologisme.
   
Nermoutier
  T. n.m. Nom propre d'une petite île de la mer de Gascogne. Elle est sur les côtes de la Bretagne & du Poitou, duquel elle dépend. Il y a un bourg avec un Monastère, dont les Moines sont habillés de noir ; ce qui a donné lieu d'appeller l'île, Nermoustier, c'est-à-dire, le Monastère noir.
   
Niche
  T. n.f. Petite tromperie, ou malice qu'on fait à quelqu'un. Les Écoliers se plaisent à faire toujours quelque niche à leurs compagnons.
Niche, en terme d'Architecture, est un enfoncement, une cavité, une place qu'on ménage dans l'épaisseur d'un mur, pour y placer une statue par le moyen d'un demi-rond qu'on y creuse. Il se dit aussi d'un petit réduit pratiqué dans un appartement pour y mettre un lit, ou dans un jardin pour s'y retirer en particulier.
   
Nourrice
  T. n.f. Qui donne à tetter à un enfant, qui a soin de l'élever dans ses premières années. Une nourrice pour être bonne, doit être saine & d'un bon tempérament, avoir bonne couleur, & la chair blanche. Elle ne doit être ni grasse ni maigre. Il faut qu'elle soit gaie, gaillarde, éveillée, jolie, sobre, chaste, douce & sans aucune violente passion. La plus excellente de toutes les nourrices, c'est la mère.
   
Nouvelliste
  T. n.m. Curieux de Nouvelles, qui les cherche, &;les débite. Les Nobles ruinés & fainéans sont d'ordinaire Nouvellistes, ou Généalogistes. Le caractère de Nouvelliste conduit au ridicule, c'est une espèce de profession qui rabaisse l'homme au-dessous de lui-même.
   
Noyé
  T. adj. Il sera très-utile de remarquer que c'est un préjugé populaire que les noyés périssent suffoqués par la quantité d'eau qu'ils ont avalée. Tous les Physiciens en conviennent aujourd'hui, & l'ouverture que l'on fait des cadavres prouve qu'ils meurent faute de respiration. Il est bon aussi de remarquer que la pratique de suspendre les noyés par les pieds la tête en bas, est non-seulement inutile, mais qu'elle peut être dangereuse.
   
Numéro
  T. n.m. Terme de Banque, & de Marchandise. Article du registre d'un Banquier, ou d'un Marchand, cotté d'un certain nombre, faisant mention d'une certaine affaire, rescription, ou marchandise. Il est enjoint aux Banquiers expéditionnaires en Cour de Rome, de mettre sur toutes leurs expéditions le chiffre ou le numero répondant à l'article de leurs registres qui en contient l'envoi. Un tel a eu un billet à cette loterie, cotté sur le numéro 5430. Les Marchands ont de certaines marques qu'ils mettent sur leurs marchandises, qui les font souvenir du prix marqué dans les articles du numéro de leurs registres qui y répondent. On le dit aussi des marques que les Notaires mettent sur leurs titres & papiers qu'ils inventorient, répondant aux articles de leurs Inventaires. Ce contrat est inventorié sous le numéro 6. On le dit aussi du chiffre que l'on met au dos d'un livre dans les grandes Bibliothèques ; pour marquer le rang & la place de ce livre. Voyez au numéro tant, & apportez la Bible que vous y trouverez.
On dit proverbialement qu'un homme entend le numéro, quand il sait découvrir le prix secret d'un Marchand, & figurément, quand il pénetre dans le secret, & de toute autre affaire où il s'agit de compte, ou de profit ; qu'il a de l'adresse, de l'intelligence.
   
Nyctage
  T. n.m. Nom de secte. Les Nyctages étoient des Hérétiques qui blâmoient la pratique de veiller la nuit pour chanter les louanges de Dieu, parce que la nuit, disoient-ils, a été faite pour le repos
   
Océan
  T. n.m. La grande mer qui environne toute la terre.
C'est cette vaste mer qui environne les deux continens qui nous sont connus, le vieux & le nouveau. L'Océan occupe plus de place dans ce que nous connoissons du globe terrestre, que la Terre. Il semble qu'on peut le diviser commodément en Océan supérieur & inférieur.
Le flux & reflux de la mer ne paroît bien que dans le grand Océan. L'Océan entre dans les terres par différens détroits, & alors il quitte son nom d'Océan pour prendre celui de Mer, ou de Golfe, ausquels on joint quelque adjectif pour les distinguer, mer Méditerranée, mer Rouge, &c. Golfe Persique, &c. Dans les endroits fort serrés, l'Océan s'appelle Détroit, détroit de Gilbraltar, détroit de le Maire ou du Maire, détroit de Magellan, &c. Magellan a navigé sur l'un & l'autre Océan. Il y a des poissons monstrueux dans l'Océan du Nord. Vasco de Gama est le premier qui a trouvé le chemin des Indes par l'Océan Atlantique. On dit aussi à l'adjectif, la mer Océane. On ne navige sur la mer Océane qu'avec des vaisseaux de haut bord, & non point avec des galères.
Océan Supérieur. Les Anciens qui n'ont connu que cette partie de l'Océan, l'ont appellée la Mer extérieure, Mare exterius ou extremum, parce qu'elle environne tout notre continent. Il y a quatre grandes parties, qui prennent leurs noms de quatre points principaux du Monde, vers lesquels elles sont. On les nomme donc l'Océan Septentrional, l'Occidental, le Méridional & l'Oriental.
Océan Septentrional, Glacial, ou Scythique. C'est cette partie de l'Océan supérieur, qui approche le plus du pole Arctique, ayant au midi le cercle du pole Arctique, & les côtes septentrionales de l'Europe & de l'Asie ; & au nord les Terres polaires inconnues. On a donné à cette mer le nom d'Océan glacial, parce que ceux qui ont cherché par cette mer un chemin pour aller par le nord au Japon, à la Chine, aux Philippines, &c. l'ont trouvée si pleine de glaces qu'il leur a été impossible d'aller plus avant, que la nouvelle Zembie. Cet Océan comprend une partie de la mer de Danemarck, ou d'Allemagne, avec celles de Moscovie & de Tartarie : quelques uns y comprennent aussi la mer des Kaimachites ou d'Amoër, qui est à l'orient de la grande Tartarie.
Océan Occidental, ou Atlantique. C'est la partie de l'Océan qui baigne les côtes occidentales de l'Europe & de l'Afrique, & s'étend depuis le cercle du pole Arctique, jusqu'à la ligne équinoctiale. Ses principales parties sont l'Océan Calédonien, la plus grande partie de la mer du Danemarck, ou d'Allemagne, la mer d'Irlande, & celles de Bretagne, de France, d'Espagne, des Canaries, du Cap-verd & de Guinée. Il est plus commode de renfermer cet Océan dans ses bornes, que de l'étendre jusqu'aux côtes de l'Amérique, comme on le fait quelquefois.
Océan Méridional, ou Éthiopien. Cette partie de l'Océan supérieur porte le nom d'Océan méridional, parce qu'il est vers le midi, s'étendant depuis la ligne équinoctiale jusqu'aux terres antarctiques inconnues ; & on l'appelle Océan Ethiopien, parce qu'il environne la basse Éthiopie en Afrique. Ses principales parties sont la mer de Congo, celle des Caffres, & celle de Zanguebar.
Océan Oriental, ou Indien. Cette partie de l'Océan prend le premier de ses noms de sa situation vers l'Orient, & le second de l'Inde orientale, qui est un des principaux pays qu'elle baigne. Cette mer s'étend depuis la côte d'Ajan, jusqu'aux îles des Larrons. Ses principales parties sont la mer d'Arabie, la mer de l'Inde, la mer de la Chine, l'Archipel des Moluques, celui de S. Lazare, & la mer de Lantchidol, qui est vers la nouvelle Hollande.
Océan Inférieur, ou Amériquain. C'est la vaste partie de l'Océan, qui baigne les côtes de l'Amérique. Cette partie de l'Océan a été inconnue, ou presque inconnue aux Anciens, de même que l'Amérique. On la partage en trois grandes parties.
1°. La mer du Nord, qui baigne les côtes orientales de l'Amérique, depuis le cercle du pole Arctique jusqu'au tropique du Capricorne.
2°. La mer Magellanique, qui environne une partie de l'Amérique méridionale, depuis le tropique du Capricorne jusqu'aux terres Australes inconnues.
3°. La mer du Sud ou Pacifique, qui baigne les côtes occidentales de l'Amérique, s'étendant vers le levant jusqu'aux îles des Larrons ; & du midi au nord, depuis le tropique du Capricorne, jusqu'à la terre de Jesso. Ces trois grandes parties de l'Océan inférieur en renferment plusieurs moindres.
Nous avons mis au mot MER tous les noms différens de la mer dont plusieurs se disent aussi avec le mot Océan, comme Océan Atlantique, Océan Oriental, Océan Occidental, Océan Septentrional, Océan Méridional, Océan Éthiopien ; mais le mot de mer est plus usité, & plus étendu. Le mot Océan ne se dit que de la grande mer, & non des golfes. Car on ne dit point l'Océan Baltique, l'Océan Rouge, l'Océan Méditerranée, l'Océan Persique, ni l'Océan de Gascogne, l'Océan d'Allemagne, &c. Il faut dire mer en toutes les occasions semblables.
   
Oie
  T. n.f. On dit, Tirer l'oie, pour exprimer une sorte d'exercice que font les bateliers, en attachant à une corde sur la riviére une oie en vie, qu'ils sont obligés d'arracher par morceaux avec les dents.
   
Onglée
  T. n.f. Panaris, mal d'aventure. C'est un mal qui cause une douleur très-sensible à l'extrémité du doigt. On prétend que pour calmer cette douleur, rien n'est plus spécifique que de mettre le doigt dans le trou de l'oreille d'un chat. On applique pour le même mal un ver de terre vivant sur le bout du doigt, & un peu plus bas. Un bon reméde encore est de faire une lessive de cendre de sarment, & d'y tremper le doigt plusieurs fois de suite.
   
Ordurier
  T. n.m. Petite machine de bois, qui est en usage chez les Religieux, & qui sert à ôter les ordures de tous les lieux que l'on balaie. Les Carmes Déchaussés appellent cette petite machine, Porteimmondice, mais tous les autres Religieux disent ordinairement Ordurier, ou Porte-ordures.
   
Otage
  T. n.m. Personne que deux partis ennemis se donnent réciproquement, quand ils sont sur le point de faire quelque traité ou capitulation pour assurance de part & d'autre de l'éxécution de ce qui sera convenu. La garnison d'une telle place capitule, elle a donné des ôtages. Un tel Officier a servi d'ôtage. Un ôtage devient accessoire, ou principal, selon l'état des choses. Il est simplement un accessoire, lors, par éxemple, qu'un Prince promet fidélité à un autre Prince, & qu'il donne, ou son fils, ou quelque grand Seigneur, pour assurance de sa parole, sans qu'il soit rien stipulé davantage. Ces ôtages ne sont qu'un surcroît de l'engagement du Prince, ensorte que s'il vient à manquer de parole, ils n'en demeurent en aucune manière responsables. Un ôtage devient principal, lorsque par une alternative on stipule qu'il répondra de l'événement des choses. Par éxemple, si une ville promet de se rendre dans un certain temps, en cas qu'elle ne reçoive point de secours, & que pour sureté de sa parole elle donne des ôtages, ces ôtages sont, comme est une caution à un créancier pour la sureté de la dette de son principal débiteur ; ensorte que si le secours arrive dans le temps, la promesse devenant nulle, les ôtages sont déchargés, & ne peuvent point être retenus ; de même que la caution est déchargée, & ne peut pas être recherchée, si le véritable débiteur paie le créancier ; mais si le secours ne venant point, cette ville ne laisse pas de fausser sa parole, & de refuser de se rendre, alors les ôtages prennent la place de la chose même, & deviennent principal, & l'on peut sur eux punir la mauvaise foi, & répéter les dommages & intérêts que l'on en souffre, comme la caution devient le principal débiteur, si le débiteur même est insolvable.
   
Pacte
  T. n.m. Traité, accord, promesse, convention. Ce mot est consacré aux sortilèges, & se dit des consentemens qu'on donne aux impostures de ceux qui prétendent faire des choses merveilleuses par la puissance ou le ministère du diable ; & en ce cas on distingue un pacte exprès, quand on donne un consentement formel à ces impostures ; & un pacte tacite, quand on pratique leurs enseignemens ou cérémonies, sans faire une renonciation expresse à tout commerce avec les puissances infernales. On dit que les Sorciers font pacte avec le diable.
   
Pantalon
  T. n.m. Bouffon, ou mascarade qui fait des danses par haut, & des postures irrégulières & extravagantes.
Pantalon, se dit aussi de l'habit que portent d'ordinaire ces bouffons ou masques, qui est fait justement sur la forme de leurs corps, & tout d'une pièce, depuis la tête jusqu'aux piés. On appelle les pantalons de Venise, ceux qui portent des habits ainsi serrés sous leurs robes.
Pantalon, se dit aussi d'un caleçon, qui est tout d'une pièce avec les chaussettes, ou d'un haut-de-chausses étroit qui tient avec les bas. Un pantalon de chamois, de toile, &c.
   
Paravent
  T. n.m. Grand volet de bois qu'on met en dehors des fenêtres aux maisons de campagne, pour défendre les vitres des orages & des vents, & pour servir de défense contre les voleurs. On l'accroche en dedans au bois de la croisée.
Paravent, se dit aussi des grands chassis de bois couverts de quelque étoffe ; qui sont attachés ensemble & mobiles. On les met dans les chambres auprès des portes, auprès du feu ; autour des lits, pour se couvrir & défendre contre le vent. Chaque chassis s'appelle une Feuille de paravent. Il y a aussi de petits paravents à hauteur du genou, qu'on met autour d'une table quand on étudie, pour n'avoir pas si froid aux piés. On donne souvent des Comédies où les Acteurs sortent de derrière un paravent, qui fait toute la décoration du théatre.
   
Parpaillot
  T. n.m. Nom injurieux qu'on a donné en quelques endroits de la France à ceux de la Religion Prétendue Réformée. On dit qu'au siége de Clérac, ils firent une sortie couverts de chemises blanches, en un temps où l'on voyoit beaucoup de papillons, que les Gascons appellent parpaillols & que de-là ce nom leur est demeuré. Borel dit que c'est à cause qu'ils courroient au danger sans crainte, & alloient chercher leur mort, comme font les papillons qui se vont brûler à la chandelle.
   
Passevolant
  T. n.m. Faux soldat & non enrollé, qu'un Capitaine fait passer aux revues pour montrer que sa compagnie est complette, ou pour en tirer la paye à son profit. Les passevolans sont condamnés à être marqués d'une fleur de lis à la joue par un réglement de l'an 1668.
   
Patatra monsieur de Nevers
  T. n.m. C'est une exclamation ironique qu'on fait quand on voit tomber quelqu'un. Ce proverbe vient de ce que François de Gonzague Duc de Nevers, courant la poste de Paris à Nevers, son cheval s'abattit dans la ville de Pouilli : sur quoi une vieille lui cria, Patatra, Monsieur de Nevers : ce qui le mit tellement en colère, qu'il y envoya des soldats qui désolèrent toute la ville. D'où vient qu'encore à présent, un passant n'oseroit dire patatra dans la ville de Pouilli, sans se mettre en danger d'être fort maltraité.
   
Paterniser
  T. v. Ressembler à son père, en avoir les traits & les manières. Ordinairement les filles paternisent plus que les garçons.
   
Pâtisserie
  T. n.f. Préparation de pâte avec plusieurs assaisonnemens friands de viande, de beure, de sucre, de fruits, comme sont les pâtés, tourtes, tartres, biscuits, brioches, &c. On ne doit point s'accoûtumer à l'usage des pâtisseries, non seulement parce qu'elles sont presque toutes pesantes sur l'estomac & difficiles à digérer, mais encore parce qu'il faut toûjours préférer autant qu'on le peut les alimens les plus simples aux composés.
   
Payeur
  T. n.m. Qui paye. Quand on est en réputation d'être bon payeur, on trouve toujours crédit. Les Nobles passent pour de mauvais payeurs.
   
Pays
  T. n.m. C'est ainsi qu'il faut écrire, & qu'écrivent en effet un très-grand nombre d'habiles gens ; ce mot a deux syllabes. La première a le son d'ai, comme dans aimer, aider, plaider, ou d'un e. La seconde a le son de l'i, comme dans benis, Paris, courlis, &c. Il faut donc deux ii, c'est-à-dire, un y dans ce mot. Sans cela l'a n'aura point le son de ai. Il faut cependant convenir que plusieurs Auteurs, ou les Imprimeurs de leurs ouvrages, écrivent païs, mettant deux points sur l'i ; mais ces deux points ne doublent point l'i, & n'apprennent point quel son doit avoir l'a ; ainsi l'on prononcera pa is, comme pa ïen, la ïque, &c.
Se dit des diverses régions, provinces & contrées de l'Univers. On dit, Tirer pays, pour dire, s'enfuir, s'évader. Il est populaire.
   
Pédant
  T. n.m. En parlant d'une femme il faut dire pédante. Regent ; Maître d'École ; homme de Collége qui a soin d'instruire & de gouverner la jeunesse ; d'enseigner les Humanités & les Arts. On les appelle aussi Regens, & quelques-uns sont simples Répétiteurs. Les écoliers sont sous la ferule & la discipline de leurs Pédans.
Se dit aussi d'un Savant mal poli, grossier, opiniâtre ; qui fait un mauvais usage des Sciences ; qui les tourne mal, qui fait de méchantes critiques & observations, comme font la plûpart des gens de Collége. Un Pédant est un homme qui a plus de lecture que de bon sens. Les Pédans sont gens toujours armés de pointes & de syllogismes, qui ne respirent que la dispute & la chicane, & qui poursuivent une proposition jusqu'aux dernières bornes de la Logique.
   
Pelote
  T. n.f. Masse qu'on fait en forme de boules de diverses choses. Les écoliers se battent avec des pelotes de neige. Cette armée se grossit comme une pelote de neige qui tombe des montagnes. En Orient on nourrit les chevaux avec des pelotes de pâte, ou de beurre. Les Pêcheurs font des pelotes pour servir d'amorce aux poissons. On fait de grosses pelotes de fil, de laine, de coton.
   
Pensum
  T. n.m. (On prononce Pinson) Mot latin que l'usage a francisé. surcroit de travail qu'on exige d'un Écolier pour le punir. On donne pour pensum de la version ou des vers à faire ou quelque chose à apprendre par coeur.
   
Pessaire
  T. n.m. Terme de Médecine. C'est un reméde solide de la longueur & de la grosseur du doigt, mais de figure pyramidale, qu'on introduit dans les parties naturelles des femmes pour provoquer les menstrues, ou pour les arrêter, ou pour empêcher la descente de la matrice, ou pour guérir d'autres maux qui leur peuvent arriver. On l'attache par un bout à un petit ruban, afin de le pouvoir retirer quand on veut. On le fait avec du liége, ou avec du bois leger, ou avec un petit fourreau de linge ou de taffetas bien délié, rempli de poudres incorporées dans de la cire, de l'huile & du coton, le tout bien pressé dans le fourreau, afin qu'il ait assez de solidité pour pouvoir être introduit.
   
Pica
  T. n.m. Appétit dépravé qui fait désirer des choses absurdes & incapables de nourrir, comme des charbons, des cendres, du plâtre, du sel, de la chaux, de la craie, du vinaigre, du poivre, & infinité d'autres semblables. Le pica est fort ordinaire aux filles, & sur-tout aux femmes grosses. Les hommes y sont plus rarement sujets. Il vient, suivant la pluspart des Médecins, des mauvais levains de l'estomac qui dépravent l'appétit : à quoi on peut ajouter le déréglement de l'imagination causé par de mauvais exemples, ou par des préjugés ridicules.
   
Piéton
  T. n.m. Fantassin, soldat qui est à pied. Se dit plus ordinairement de ceux qui marchent à pied, qui font grande diligence. Les Basques sont bons piétons. Les femmes font mauvaises piétonnes, ne sauroient aller bien loin à pied.
   
Pilon
  T. n.m. Condamner au pilon. Le Dictionnaire de Richelet a eu bien de la peine à s'introduire en France. A peine commençoit-on de le tolérer, qu'il fut proscrit & condamné au pilon. Avertissement de l'édit. de 1728. On s'est servi pour cette nouvelle édition d'un exemplaire du Dictionnaire de Richelet imprimé à Rouen en 1719 édition qu'on sçait être aussi mauvaise que celle qui parut en 1709. & dont un grand nombre d'exemplaires furent condamnés au pilon par ordre de la Cour. Les Auteurs du Dictionnaire ne sçavent ce que c'est que Mettre un livre au pilon : ils soupçonnent qu'on a voulu dire billon C'est une erreur : mettre un livre au pilon, c'est ordonner que tous les exemplaires seront saisis par les Ministres de Police, & portés aux moulins à papier, pour être rebattus, & en faire du papier gris, ou de la maculature pour faire du carton.
   
Piloner
  T. n.m. Piloner la laine. C'est la remuer fortement avec une pelle de bois, dans une chaudiére remplie d'un bain plus que tiéde, composé des trois quarts d'eau claire & d'un quart d'urine, pour la dégraisser au sortir de la balle, avant que d'être battue sur la claie.
   
Pimprelocher
  T. v. Accommoder les cheveux, coëffer d'une manière bizarre & extraordinaire. "La Martin (fameuse coëffeuse) l'avoit pimprelochée par plaisir comme un Patron de mode. Tous les cheveux coupés sur la tête, & frisés naturellement par cent papillottes qui lui font souffrir mort & passion toute la nuit. Tout cela fait une petite tête de chou ronde... C'étoit la plus ridicule chose que l'on pût imaginer..." Lett. de Madame de Sévigné in-12. 1726. to. 1. p. 43.
   
Piscine
  T. n.f. Petit étang ou vivier où l'on pêche, & où l'on garde du poisson. Ce mot n'est en usage qu'en cette phrase de l'Écriture. La Piscine probatique, le Lavoir où se fit le miracle du paralytique. Combien de paralytiques languissent, & meurent sur les bords de la Piscine, faute d'un homme qui les y jette, lorsque l'Ange la remue ?
   
Plica
  T. n.f. Terme de Médecine. Maladie dans laquelle il sort du sang par l'extrémité des cheveux. Parce que les Polonois y sont fort sujets, on l'appelle plica polonica. La plica polonica prouve que les cheveux sont creux, que ce sont des canaux.
   
Plumée
  T. n.f. Plein la plume d'encre. Quand on prend une trop grosse plumée d'encre, on est sujet à faire des pâtés.
   
Plumet
  T. n.m. de Pilote. Ce sont plusieurs plumes qu'on met dans un petit morceau de liége, & qui voltigeant au gré du vent, font connoître d'où il vient, plus précisément que les girouettes. Les mariniers Hollandois ne s'en servent point, ils ne sçavent ce qu'on leur veut dire quand on leur en parle.
   
Polluer
  T. v. Profaner un lieu saint ; salir, contaminer son corps qui est le temple de Dieu. Une Église se pollue par l'effusion du sang, ou de la semence, il la faut rebénir. Les Juifs se tenoient pollués par l'attouchement d'un corps mort, par les menstrues des femmes.
POLLUTION. s. f. Profanation d'un temple. Les Églises en temps de guerre sont sujettes à pollution, par les désordres qu'y font les soldats, par la retraite qu'y font les paysans. La pollution d'une Église dure jusques à ce qu'elle ait été rebénie.
Pollution, se dit aussi de l'ordure qui se commet sur son propre corps par quelque attouchement impudique. Il y a des pollutions volontaires, d'autres involontaires. Tous attouchemens sont criminels, quand il y a danger de pollution. Nous faisons des prières à Complies, pour être préservés des pollutions nocturnes.
   
Pommade
  T. n.f. Composition faite avec des pommes & des graisses, qui sert à plusieurs usages. La pommade sert à guérir plusieurs maladies du cuir, des élevures, des gersures ; à rendre le teint frais, net & poli : à adoucir les mains ; à mettre sur les cheveux pour les poudrer & friser, &c. On fait des pommades de jasmin, d'orange, de jonquilles, de tubéreuses, c'est-à-dire, on leur donne l'odeur de ces fleurs-là. La bonne pommade se fait avec de la graisse de chevreau, des pommes de courtpendu, & un citron tranché par rouelles, avec un verre d'eau rose & demi-verre de vin blanc bouillis & coulés, & ensuite arrosés d'huile d'amande douce.
   
Potage
  T. n.m. Jus de viandes cuites, dans lequel on fait détremper ou mitonner du pain taillé en menues tranches. On sert les potages à l'entrée du repas. On fait des potages de différentes sortes. Les potages de santé sont les potages ordinaires faits avec un chapon, un jarret de veau, du boeuf & du mouton. Un potage de pigeonneaux, de canard aux navets, de perdrix aux choux, de béatilles, d'écrevisses, ou bisques & demi-bisques : potages aux herbes ou ouilles ; potage à la Jacobine, ou au fromage, à la purée, au lait, à l'oignon
   
Potin
  T. n.m. Métal factice & cassant, composé de l'excrément de cuivre jaune, & de quelque mélange de plomb, d'étain & de calamine. On fait des chandeliers de potin. C'est un métal qui ne se peut dorer. Il est ainsi nommé, à cause qu'on en fait souvent des pots.
On appelle Potin à Rouen, les longs verbiages & les caquets.
   
Pouiller
  T. v. Vieux mot & hors d'usage à Paris, qui signifioit autrefois, Vêtir un habit. Il est encore en usage dans les provinces, & dans ses composés dépouiller & dépouille. Il signifioit aussi, Chanter pouilles. Ces deux femmes se sont pouillées de la belle manière.
   
Poulet
  T. n.m. Poulet, signifie un petit billet amoureux qu'on envoie aux Dames galantes, ainsi nommé, parce qu'en le pliant on y faisoit deux pointes qui représentoient les ailes d'un poulet. On l'appelle encore : Billet doux. Autrefois les prudes faisoient grand scrupule de recevoir des poulets ; maintenant elles en ont de pleines cassettes. J'aurois à présent de quoi vous écrire un beau poulet.
Poulet est aussi un nom que donnent les papetiers au petit papier coupé & doré propre à écrire ces poulets.
   
Préservatif
  T. n.m. Remède qui sert à se précautionner, à se garantir d'un mal qui menace. Au temps de la peste il faut prendre des préservatifs contre le mauvais air. Le vin, les cardiaques sont de bons préservatifs. Ce remède ne guérit pas, mais c'est un préservatif.
Préservatif, se dit aussi de certains remèdes superstitieux, qu'on appelle autrement Phylacteres, & qu'on pend au cou, aux bras, & aux jambes des hommes & des bêtes, pour les préserver de quelque fàcheux accident.
Préservatif, se dit aussi figurément en Morale. La lecture est un préservatif contre une infinité de dérèglemens où l'on tombe quand on ne sait à quoi s'occuper.
   
Presse
  T. n.f. Foule de peuple qui veut entrer en un lieu qui ne le peut pas contenir commodément ; multitude de personnes qui se pressent. Il y avoit une telle presse à cette cérémonie, que je n'y ai pû entrer. Les coupeurs de bourse font bien leurs affaires à la presse.
Presse, se dit de l'empressement qu'on a à faire, ou à voir quelque chose. La presse est au blé, au bois ; chacun en veut avoir. Tout le monde va boire du caffé, mais je n'y ferai pas la presse. Cette affaire est fort ruineuse, il n'y a pas grande presse à s'y fourrer, à y enchérir.
   
Profiteroles
  T. n.m. Ce mot se disoit autrefois d'une pâte cuite sous les cendres. Maintenant les cuisiniers font encore des potages de profiterole avec de petits pains dégarnis de mie, sèchés, mitonnés, & garnis de béatilles.
   
Prospectus
  T. n.m. Mot Latin nouvellement introduit dans le commerce de la Librairie, particuliérement dans celui des livres qui s'impriment par souscription. Il signifie le Projet ou programme de l'ouvrage qu'on propose à souscrire, la matiére qu'il traite, le format & la quantité de volumes qu'il doit avoir, le caractère, le papier, soit grand, soit petit, qu'on veut employer dans l'édition ; enfin les conditions sous lesquelles se fait la souscription : ce qui comprend principalement la remise qu'on fait aux Souscripteurs, & le temps auquel l'ouvrage souscrit doit se délivrer.
Les Libraires publient des Prospectus pour avertir qu'ils vont imprimer de certains livres.
   
Proxénète
  T. n.m. Courtier, entremetteur d'un marché. Ce mot vient du Grec, Courtier. On donne ce nom aux honnêtes Entremetteurs qui vont vendre des Offices, qui font des mariages, ou autres affaires.
   
Publicité
  T. n.f. Notoriété. Il n'a guère d'usage qu'en parlant d'un crime commis à la face de tout le monde. La publicité du crime le rend encore plus punissable.
   
purée
  T. n.f. Jus ou suc qu'on tire des pois. La première purée se tire des pois, lorsqu'ils cuisent ; la seconde, lorsqu'on les écache, & qu'on les passe dans une passoire. On fait du potage de purée les jours maigres. On fait aussi des purées de féves, de lentilles & autres légumes. Les ivrognes appellent quelquefois le vin, de la purée de Septembre.
   
Quart d'heure de Rabelais
  T. n.m. C'est-à-dire, mauvais momens à passer semblables à ceux où se trouvoit Rabelais, quand il falloit compter dans les hôtelleries, & qu'il n'avoit pas de quoi payer sa dépense. Voyez à la fin des particularités de sa vie, au devant de ses oeuvres, le plaisant stratagême dont il s'avisa un jour à Lion, pour se faire conduire de-là à Paris, sans qu'il lui en coutât rien, n'ayant plus du tout d'argent pour achever son voyage. Après avoir payé certaine somme une fois pour tout, on est exempt de ce désagréable Quart d'heure de Rabelais, & on a le plaisir de sortir du cabaret sans compter avec l'hôte.
   
Radar
  T. n.m. Terme de Relation. C'est le nom que l'on donne en Perse à de certains Archers qui ont soin d'assûrer la route des grands chemins. Les Radars sont postés aux carrefours, à l'entrée des ponts, & aux autres endroits par où il faut absolument passer. Tous ceux qu'ils rencontrent, sont obligés de leur déclarer d'où ils viennent, & où ils vont. Lorsque quelqu'un a été volé, il n'a qu'à s'en plaindre au Gouverneur de la Province. Pour peu qu'il puisse établir la réalité du vol, soit par ses Registres, soit par témoins, ou autrement, il ne fait point de difficulté de lui payer le prix de son vol, tant il compte sur l'exactitude des Radars. Ils ne se tiennent pas toûjours sur les grandes routes : il y en a qui font des courses par les montagnes & les lieux écartés, & qui se saisissent de tous ceux qu'ils y rencontrent, pour les faire expliquer sur les raisons qui les empêchent d'aller le droit chemin, ensorte que les malfaiteurs sont aussitôt découverts. Cette belle police est cause qu'il se fait peu de mauvaises actions en Perse. Quoique les gages des Radars ne soient pas considérables, on n'en manque cependant pas, parce que les Marchands leur font des libéralités pour les récompenser du soin qu'ils prennent pour la sûreté des chemins & des Voyageurs.
La raderie est le droit qui se paye pour l'entretien de ces gardes. Personne n'en est exempt. il n'est cependant établi que pour les marchands.
   
Ramage
  T. n.m. Le chant naturel d'un oiseau, tel qu'il dégoise de lui-même sur les rameaux, ou branches des arbres. Se plaire au doux ramage des oiseaux. Chaque oiseau a son ramage particulier. Le plaisir que donnent les volières, est d'entendre tous les différens ramages des oiseaux. Ainsi on dit que la colombe roucoule, le pigeon caracoule, la perdrix cacabe, le corbeau corraille ou croasse. On dit des poulets pipier, piauler ; des poules clocloquer, craqueter, clousser ; du coq coqueliquer ; du dindon glougouter ; du geai cageoler : du rossignol gringoter ; du pinçon fringotter ; du grillon grésilloner : de l'hirondelle gazouiller ; du milan huir ; du hibou huer ; du jars jargonner ; des grues craquer & trompeter ; de la cigale claqueter ; des huppes pupuler ; des merles sifler : des perroquets & des pies causer ; des cailles carcailler ; des tourterelles gémir ; & de l'allouette tirelirer.
   
Ramequin
  T. n.m. C'est une espèce de ragoût que font les goinfres pour se provoquer à boire, & qui est fait de fromage étendu sur une rôtie assaisonnée avec du sucre, du poivre, ou autre épicerie. On ne s'avise guère de faire des ramequins qu'au dessert, & pour exciter à boire.
   
Randonnée
  T. n.f. Terme de Chasse, qui se dit des lieux où les cerfs se font battre dans l'étendue de leur course.
   
Recette
  T. n.f. Se dit des petits secrets que plusieurs particuliers, & sur-tout des Charlatans, se vantent d'avoir pour guérir quelques maladies. Il n'y a personne qui aille voir un gouteux, un hydropique, &c. qui ne lui enseigne quelque recette pour son mal.
   
Régalade
  T. n.f. M. Petit de l'Académie Royale des Sciences, en distinguant les différentes façons de boire, dit que celle qui consiste à verser la boisson dans la bouche, s'exécute en trois maniéres. Dans la premiére, qui est la plus commune, on verse doucement, à mesure que la langue conduit la boisson dans le gosier. Dans la seconde, on verse brusquement tout à la fois, & la langue conduit le tout dans le gosier avec la même vîtesse : ce qui s'appelle Sabler. La troisiéme se réduit à verser dans la bouche, la tête étant renversée : & c'est boire à la régalade, ou au galet.
   
Rehanter
  T. n.m. Hanter ou fréquenter de nouveau. Ces deux amies ont été long-temps fort brouillées, mais j'apprens qu'elles commencent à se rehanter.
   
Rendés-vous
  T. n.m. Lieu où l'on se doit trouver à certain jour & heure assignée. Ce mot a été trouvé si commode que la pluspart des nations s'en servent en François, leur langue manquant de cette expression. On donne un rendés-vous général à l'armée, des rendés-vous particuliers à des Régimens, qu'on appelle quartiers d'assemblées. On donne en ville un rendés-vous pour parler d'affaire, pour faire quelque partie de plaisir. Les Tuilleries sont le rendés-vous du beau monde. Les Amans se donnent des rendés-vous secrets. La vertu d'une femme est déja bien ébranlée, quand elle donne des rendés-vous.
   
Restaurant
  T. n.m. Aliment ou remède qui a la vertu de réparer les forces perdues d'un malade, ou d'un homme fatigué. Un consommé, un pressis de perdrix, sont de bons restaurans. Le vin, l'eau-de-vie, les potions cordiales, sont de bons restaurans pour ceux dont les esprits sont épuisés. Il y a des restaurans distilés à l'alembic, qui sont des extraits de chairs succulentes & délicates avec mie de pain blanc & des eaux & poudres cordiales, des conserves & électuaires, & autre chose de bonne substance & odeur. La gelée est une espèce de restaurant, mais elle est plus alimenteuse, & de consistance plus ferme que le restaurant qui est liquide.
   
Roulette
  T. n.f. Petite roue qui supporte un fardeau, qui le fait rouler. Les canons des vaisseaux sont posés sur des roulettes.
Roulette, est aussi une petite couchette qui roule sur des roues pour la transporter, & la cacher sous un autre lit quand on veut. Un mari qui couche dans la roulette, tandis que sa femme couche au grand lit, est un grand sot.
   
Salacon
  T. n.m. C'est le nom qu'on donne, par proverbe, à ceux qui sont tombés dans une pauvreté honteuse, après avoir dissipé leur bien par le luxe & la débauche, ou, selon d'autres, à ceux, qui quoique tombés dans la pauvreté, font encore paroître des sentimens ambitieux, & ont plus d'orgueil que les plus opulents. Ce nom vient d'un nommé Salacon, qui avoit les défauts dont on vient de parler à un si haut degré, que les Anciens le citoient en proverbe, comme le fait voir Erasme dans ses Adages.
   
Salope
  T. adj. Mal-propre en son manger, en ses habits, en son logement. On n'aime point à se servir de valets salopes, à aller visiter, ou à recevoir chez soi des gens salopes.
   
Savanne
  T. n.f. C'est le nom que les François du Canada donnent aux forêts composées d'arbres résineux, c'est-à-dire, de pins, de sapins, de mélèses, & dont le fond est humide, & couvert de mousse. Il y a des Savannes fort épaisses, & d'autres qui sont claires. Le Caribou habite dans les Savannes, & quand elles sont épaisses, il s'y fait des routes.
Sur ce mot on lit dans le Dictionnaire que c'est le nom que les François du Canada donnent aux forêts composées d'arbres résineux. Le mot de savanne ne signifie point forêt, il signifie prairie, & vient de l'Espagnol savana, qui veut dire une prairie.
   
Savate
  T. n.f. Vieux soulier fort usé. Les pauvres gens ramassent les vieilles savates qu'on jète dans les rues. On brûle de vieilles savates au nez des femmes qui ont des maux de matrice.
On donne le nom de la savate au Messager qui porte les lettres à pied d'une ville à l'autre dans les postes détournées.
La savaterie est le lieu où l'on trafique de vieille chaussure, où demeurent des savetiers. Il y a à Paris une rue de la savaterie.
   
Scarificateur
  T. n.m. Instrument de Chirurgie fait en forme de boëte, au bas de laquelle sont dix-huit roues tranchantes comme un rasoir, qu'on bande avec un ressort, & qui se débande avec un autre. Scarificator. Il sert pour faire évacuer le sang épandu sous le cuir, parce qu'il fait dix-huit incisions à la fois qui font moins de douleur, que si on les faisoit l'une après l'autre.
   
Scénite
  T. n.m. Qui habite sous des tentes. Qui n'a pour maisons que des tentes. Ce nom se dit de quelques peuples qui n'ont point de demeures fixes, mais qui changent souvent, & qui pour cela, n'ont point d'autres maisons que des tentes qu'ils transportent avec eux.
   
Scénographie
  T. n.f. C'est la description d'une côte, d'un pays, tel qu'il se présente à nos yeux.
   
serre-tête
  T. n.m. Ruban qu'on met autour du bonnet de nuit, afin d'avoir la tête plus serrée, & d'empêcher les rhumes qu'un air trop froid pourroit causer.
   
Société
  T. n.f. Assemblage de plusieurs hommes dans un lieu pour s'entre-secourir dans les besoins. Les Sauvages ne vivent point en société. Les hommes ont fait des loix sévères contre ceux qui troublent la société civile. La société humaine n'est bien souvent qu'une troupe de gens mal satisfaits les uns des autres, & qui ne sont unis que par leur intérêt.
Société, signifie encore, Commerce civil du monde ; liaison. Le véritable esprit du monde a trouvé l'art d'introduire une certaine civilité familière, qui rend la société commode & agréable. Sans la sincérité, la société civile est une espèce de brigandage. La société est un commerce de mensonges officieux, & l'on s'y fait une politesse de tromper, & un plaisir d'être trompé.

Société, est aussi une liaison particulière de quelques personnes, formée ou par intérêt, ou pour vivre régulièrement. Les Traitans font ensemble des sociétés, des traités. Les Religieux font des sociétés, des Congrégations pour vivre régulièrement & en commun. Bien des gens appellent les Jésuites, les Pères de la société de Jésus ; mais les Jésuites disent de la Compagnie de Jésus, & non pas de la société de Jésus.

   
Soupatoire
  T. adj. Du soupé. On a vu pendant un temps qu'on ne parloit à Paris qu'en oire. On disoit l'heure soupatoire ou dinatoire, pour, l'heure du soupé & du diné, & quantité d'autres encore plus ridicules.
   
Souteneur
  T. n.m. Pilier des lieux de débauche, qui a soin de faire payer ceux qui les fréquentent, & quelquefois bien au-delà de ce qui est dû. Filou, Coupe-jarret.
   
Spéculateur
  T. n.m. Qui s'attache à la contemplation, à l'admiration des grandeurs de Dieu & des mystères, des causes naturelles & célestes.
   
Suppositoire
  T. n.m. Terme de Pharmacie. Médicament solide qui tient lieu d'un lavement, & qui produit le même effet. Il est composé de miel commun, ou avec du savon ou de l'huile, dont on fait de petites quilles de la longueur & grosseur du petit doigt, arondies & faites presque en pyramide. Il a été inventé pour la commodité des personnes qui ont de la répugnance à prendre des clystères, ou dont la maladie ne le permet pas. En Latin balanus, ainsi nommé, parce qu'il avoit autrefois la figure d'un gland. Maintenant on le fait en forme d'une chandelle de cire, & pour cela en Languedoc on l'appelle candelette. On y mêle quelquefois de la poudre de scamonée, d'euphorbe, de coloquinte, &c. Quelquefois il est fait simplement d'un lardon, d'un tronc de porée ou autre chose semblable, qu'on met comme une tente, dans le siége pour irriter le muscle sphincter, & l'obliger à pousser dehors les excrémens. On ne peut nier que les suppositoires n'agissent en irritant.
   
Syndiquer
  T. v. Blâmer les actions d'autrui, y trouver à reprendre, & les vouloir corriger. Il est difficile de vivre avec cet homme-là, il syndique tout ce qu'on fait. Les faux dévots sont sujets à syndiquer toutes les actions d'autrui.
   
Tapecul
  T. n.m. C'est la partie chargée d'une bascule, qui sert à abaisser & à lever un pont levis, & qui est presque en équilibre avec lui.
Tapecul, se dit encore d'une poche que les Capucins portent, dit-on, sous leurs habits par derrière, parce qu'elle leur bat les fesses.
   
Tata
  T. n.m. Terme enfantin. C'est une lisière qu'on attache au dos des robes des petits enfans à qui on apprend à marcher, par où leurs Nourrices les tiennent, pour empêcher qu'ils ne tombent. Cet enfant est encore au tata, sa Nourrice le tient par le tata.
   
Tic
  T. n.m. Sorte de mouvement convulsif auquel quelques personnes sont sujettes. Moliére avoit un hoquet ou tic de gorge qui rendoit d'abord son jeu désagréable à ceux qui ne le connoissoient pas.
   
Tonneler
  T. n.m. Signifie figurément faire tomber dans quelque piége. Les parens de la fille ont si bien tonnelé le jeune homme, qu'ils la lui ont fait épouser. Ce mot n'est pas du bel usage.
   
Toupier
  T. v. Faire plusieurs tours & retours inutiles dans une maison, sans savoir ce qu'on fait, ni ce qu'on cherche. Voilà une servante qui ne fait que toupier, & qui ne fait point de besogne.
   
Truander
  T. v. Demander l'aumône par libertinage & pure fainéantise. Il y a des gens qui sont nés avec l'inclination de truander. On dit maintenant trucher.
   
Tutoyer
  T. v. Traiter quelqu'un avec mépris, ou avec une grande familiarité, en lui parlant par tu, & par toi. Il n'y a que les gens rustiques & incivils qui se tutèyent. Les honnêtes-gens n'aiment point à être tutoyés. Il faut tutoyer rarement, & sur-tout il ne faut pas tomber dans le ridicule de ceux qui tutoient les gens qui sont beaucoup au-dessous d'eux.
   
Vaudeville
  T. n.m. Chanson que le peuple chante, & qui court dans les rues. On vous chante en vaudeville. Les chansons qu'on chante sur le Pont-neuf, sont de vrais vaudevilles. Cette femme est fort décriée, on l'a mise dans les vaudevilles.
   
Ventilateur
  T. n.m. On publia en 1744. un livre sous le titre de Description du Ventilateur, par le moyen duquel on peut renouveller facilement & en grande quantité l'air des mines, des prisons, des hôpitaux. Le ventilateur est une espéce de soufflet ou pompe d'air, qui attire tout l'air d'une chambre & d'un appartement, le conduit dehors, & donne lieu à celui de dehors de le remplacer dans cet appartement. En Angleterre on se sert déja du ventilateur dans les vaisseaux de guerre, & dans plusieurs mines de charbon ; on s'en sert aussi pour sécher le houblon, les grains, la poudre à canon, &c. L'air corrompu est très-nuisible à la santé, & cause une infinité de maladies & par rapport au corps & par rapport à l'esprit. Le ventilateur a été inventé pour parer à ces inconvéniens, en renouvellant l'air où il a besoin d'être renouvellé.
   
Verdagon
  T. n.m. Nom qu'on donna au vin de 1725, qui étoit de très-mauvaise qualité. Les pauvres Religieux furent réduits au verdagon. Quand on le laissoit demi-heure en bouteille, il devenoit noir. Les tonneaux où il y en avoit eu étant tous corrompus, on n'y pouvoit plus mettre d'autre vin.